Les entreprises adaptées doivent mendier les moyens de créer des emplois
La faible augmentation du nombre d’aides au poste freine le développement des entreprises adaptées. L’aide publique constitue pourtant un bon investissement puisqu’elle reste intégralement compensée par les recettes fiscales et sociales.
Les nouvelles aides au poste demeurent une denrée rare. Pour 2017, le projet de loi de finances, présenté par le gouvernement, n’en prévoyait aucune supplémentaire. Ces aides, versées par l’État, sont pourtant essentielles pour les entreprises adaptées (EA). Elles leur permettent de compenser la moindre productivité des travailleurs handicapés qu’elles emploient – 80 % de leurs effectifs – ainsi que les autres surcoûts (encadrement supplémentaire, accompagnement socio-professionnel, etc.).
L’Unea demande 1 000 aides de plus en 2017
En 2016, 22 536 aides au poste équivalent temps plein avaient été budgétées par le ministère des Finances. L’Union nationale des entreprises adaptées (Unea) en réclame 1 000 de plus pour 2017 afin de permettre à ces sociétés de continuer à se développer. « Actuellement, près de 700 emplois de personnes en situation de handicap sont déjà en attente de leur financement, précise Stéphane Foisy, son président. Nous allons être en incapacité de répondre aux besoins des personnes les plus éloignées du marché du travail. »
« Chaque euro investi » est récupéré
L’aide publique aux entreprises adaptées constitue pourtant un bon investissement, à en croire les résultats de la dernière étude sur le sujet menée par KPMG. Ce cabinet d’audit a comparé les dépenses publiques au bénéfice d’un travailleur handicapé en EA (aide au poste et subvention spécifique mais aussi allègements de charges, etc.) et les recettes publiques qu’il génère (charges sociales, impôts et taxes acquittés par le salarié et son employeur).
« Chaque euro investi par la collectivité publique lui est retourné sous forme de recettes fiscales et sociales », résume l’Unea, dès lors que le travailleur handicapé d’une EA perçoit une rémunération égale au Smic + 0,3 %. Ce qui est le cas de l’immense majorité de ces salariés. Sans compter les économies réalisées, par ailleurs, sur le versement de l’allocation adulte handicapé ou les indemnités chômage, notamment. Et puis l’aide au poste – 14 000 € environ – coûte à peine plus cher qu’un emploi d’avenir mais beaucoup moins qu’un emploi créé grâce au crédit d’impôt pour la compétivité et l’emploi (Cice).
Les députés budgètent 500 aides au poste
Alors que le nombre de demandeurs d’emploi handicapés avoisine les 500 000, l’État aurait donc tout intérêt à favoriser les créations d’emploi en entreprises adaptées. Pourtant, l’augmentation du nombre d’aides au poste se fait au compte-goutte : 1 000 en 2012 et 2013, 0 en 2014, 500 en 2015 et 2016. Et l’Unea a dû batailler à chaque fois pour les obtenir.
Cette année encore, elle a dû convaincre les députés de corriger la copie du gouvernement : le PLF, adopté en première lecture par l’Assemblée nationale, fin octobre, prévoit finalement 500 aides au poste supplémentaires.
Les commandes valent des emplois
Pourquoi une telle parcimonie si cette dépense est efficace ? Les entreprises ordinaires verraient-elles d’un mauvais œil le développement des entreprises adaptées car elles les concurrenceraient sur certains secteurs d’activité ? « Au contraire, souligne Sébastien Citerne, le directeur général de l’Unea. Les commandes qu’elles nous passent sont un moyen, pour elles, de remplir leur obligation d’emploi de 6 % de travailleurs handicapés. » Les contrats passés avec des EA sont en effet convertibles en “équivalent salariés handicapés”.
Le financement reste trop cloisonné
« La raison de cette frilosité est plus simple, ajoute Sébastien Citerne : l’argent pour financer les aides au poste sort d’une seule poche, celle de l’État, alors qu’une partie seulement des recettes générées lui revient. Le reste est perçu par la Sécurité sociale et les collectivités locales. »
« C’est malheureusement vrai, regrette la députée Martine Carillon-Couvreur, ex-présidente du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH). Il n’y a pas de vision d’ensemble sur ce type de questions budgétaires. Ce qui freine la mise en œuvre de solutions intéressantes. Il faut revoir notre manière d’appréhender recettes et dépenses, avoir une approche moins cloisonnée. » En attendant, les entreprises adaptées devront continuer à tendre la main. Franck Seuret
ACTUALISATION DU 2 JANVIER 2017 : La loi de finances 2017, adoptée fin décembre 2016, compte 500 aides au poste supplémentaires, ce qui porte leur total à 23 036.
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