Accessibilité : une chanson et un clip satiriques sur les places réservées
Il menace une conductrice se garant sur une place réservée, la nargue en avançant plus vite qu’elle dans les rayons d’un supermarché, empêche avec délectation des enfants de monter dans un ascenseur de centre commercial…
Voilà un personnage de handicapé en fauteuil roulant des plus antipathiques ! La chanson “C’est ma place” ose l’inversion des rôles. À découvrir sur le tout récent album “L’amour vache” d’Anna C et Barbiche, duo de chanson française caustique de Nancy, elle a été co-écrite avec les Rim’ailleurs, autre duo nancéen, dans un registre plus poétique.Tandis qu’Anna C raconte ses tracas d’un samedi de courses, avec le cynisme du “je m’enfoutiste à l’égard des personnes en situation de handicap”, Florent Noblot, le chanteur des Rim’ailleurs (Faire Face l’avait rencontré il y a deux ans), lui donne la réplique sur le mode revanchard.
Le refrain guilleret trotte longtemps dans la tête. « Ah quel bonheur d’être invalide, cheveux au vent, je suis grisé, je n’ai besoin de personne en fauteuil motorisé », chante Florent Noblot. « Moi aussi je veux une caisse prioritaire », ou « pour moi il n’y a jamais de pitié », peste Anna C.
Sur les quatre artistes, Florent est le seul en situation de handicap moteur, mais tous prennent un plaisir évident à renverser les codes. Le clip, réalisé avec un budget insignifiant en une seule journée, avec des amis comme figurants, est une véritable perle, à savourer sans modération.
Entre la poésie des Rim’ailleurs et « l’élégance punk » que ce groupe trouve à Anna C et Barbiche, il y eut un coup de cœur mutuel il y a quelques années et une amitié s’est nouée entre ces trentenaires. « Le thème du handicap est traité trop souvent de manière politiquement correcte. Une certaine politesse s’installe. Nous voulions faire rire. Le sujet de la place de stationnement pour handicapé s’y prête car tout le monde y est confronté », justifie Barbiche. « Je voulais faire gagner ceux qui ne gagnent pas d’habitude, sans verser dans la morale », poursuit Anna C. Florent Noblot approuve : « Ce ton inhabituel permet de parler de l’image gentillette des personnes handicapées dans la société. Or, elles ont quelque chose à dire et peuvent fantasmer de se venger, comme dans la chanson ! »
Les deux groupes ont déjà un nouveau projet en commun : monter un spectacle pour enfants où la norme serait le handicap et la personne valide considérée comme un monstre.
Élise Descamps – Photo DR
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