L’ordonnance sur l’accessibilité décryptée
L’ordonnance du 26 septembre 2014, précisant les modalités d’application des Agendas d’accessibilité programmée (Ad’ap) instaure de nouvelles règles du jeu. Les gestionnaires d’établissement recevant du public disposeront de trois à neuf ans pour mettre aux normes leurs locaux. Parfois même plus. Ce texte instaure, en effet, de nombreuses possibilités de prolonger les délais, voire de s’en affranchir.
Qui doit déposer un Ad’ap ?
Tous les propriétaires ou exploitants d’un établissement recevant du public (ERP) ne respectant pas les normes d’accessibilité au 31 décembre 2014 sont tenus d’élaborer un Agenda d’accessibilité programmée. Cet Ad’ap précise les travaux à réaliser, le calendrier et les financements.
Ils doivent le déposer à la mairie ou en préfecture avant le 1er octobre 2015. Mais cette date limite peut être prorogée de trois années maximum – jusqu’au 30 septembre 2018, en cas de « difficultés techniques ou financières ». Quatre mois après le dépôt du dossier, sans réponse négative de l’administration, l’Ad’ap est considéré comme validé.
Quels sont les nouveaux délais de mise aux normes pour les petits établissements ?
Les gestionnaires d’ERP pouvant accueillir au plus 200 personnes auront trois ans maximum pour réaliser les travaux à compter de la date d’approbation de l’Ad’ap, donc jusqu’au 30 janvier 2019 au plus tard. Voire le 30 janvier 2022, s’ils obtiennent un report maximal de la date de dépôt de leur Ad’ap. Ou encore plus tard. Car « en cas de contraintes techniques ou financières particulières », ils peuvent bénéficier d’une seconde tranche de trois ans, soit six années au total, donc jusqu’au 30 janvier 2022 ou… 2025, en tenant compte du report possible de la date de dépôt de l’Ad’ap. Ces ERP de 5e catégorie représentent 80 % des ERP.
Quels sont les nouveaux délais pour les grands établissements ?
– Les gestionnaires d’ERP plus grands – 1re à 4e catégorie – disposeront de six années maximum, après la date d’approbation de leur Ad’ap, pour le mener à bien (3 ans + 3 ans s’ils justifient de travaux déjà réalisés durant les trois premières années), donc jusqu’au 30 janvier 2022 au plus tard. Ou 30 janvier 2025 s’ils ont obtenu un report maximal de la date de dépôt de leur Ad’ap.
Attention : dans le cas où un gestionnaire d’ERP possède plusieurs établissements dont au moins un de 1re à 4e catégorie, il peut bénéficier d’un délai de six ans pour l’ensemble de ces ERP, y compris les plus petits.
– « Dans le cas d’un patrimoine dont la mise en accessibilité est particulièrement complexe » (plusieurs établissements, etc.), les travaux peuvent s’étaler sur trois tranches de trois années, soit neuf ans, donc jusqu’au 30 janvier 2024 ou 30 janvier 2027 s’ils ont obtenu le report maximal de la date de dépôt de leur Ad’ap.
Pourquoi cela peut prendre encore plus de temps ?
« En cas de difficultés techniques ou financières graves ou imprévues », la durée d’un Ad’ap peut être prolongée d’un an. « En cas de force majeure », la prolongation peut atteindre trois ans, renouvelable « si les circonstances de force majeure ou leurs conséquences l’imposent ». Soit, dans les cas extrêmes, une accessibilité reportée à 2030, voire plus encore.
Que se passe-t-il si le gestionnaire ne respecte pas son Ad’ap ?
Si le gestionnaire n’a pas fini les travaux au terme de son Ad’ap, le préfet dispose du pouvoir de lui accorder un délai supplémentaire de douze mois maximum. Le représentant de l’État peut aussi lui imposer de constituer une provision comptable correspondant au montant des travaux à réaliser. Voire de fixer une sanction financière, comprise entre 5 et 20 % du montant des travaux restant à réaliser.
Quelles sont les autres sanctions prévues ?
– Si le gestionnaire ne dépose pas d’Ad’ap dans les délais prévus : 1 500 € pour un établissement de 5e catégorie ; 5 000 € dans les autres cas.
– Si le gestionnaire ne transmet pas les documents de suivi (à la fin de la première année, à mi-parcours, etc.) : 1 500 € pour un établissement de 5e catégorie ; 2 500 € dans les autres cas.
Pourquoi beaucoup de professionnels de la santé, professionnels libéraux et certains commerçants ne seront pas tenus de rendre leurs locaux accessibles ?
Les ERP situés dans « un immeuble collectif à usage principal d’habitation » bénéficient d’une dérogation « lorsque les copropriétaires refusent les travaux de mise en accessibilité », précise l’ordonnance.
Que prévoit l’ordonnance pour les transports ?
Les collectivités locales doivent déposer un schéma directeur d’accessibilité-ad’ap avant le 1er octobre 2015. Mais cette date limite peut être prorogée de trois années maximum – jusqu’au 1er octobre 2018, en cas de « difficultés techniques ou financières ». Seuls les « points d’arrêt prioritaires » des services de transport devront être rendus accessibles. Un décret précisera, courant octobre, les critères permettant de déterminer si un arrêt doit être prioritaire ou pas. De plus, la proportion de bus, trains et métros accessibles, et sa progression, seront également fixées par décret.
La durée de réalisation des Ad’ap varie selon le type de transport :
– transport urbain : trois ans maximum sauf en Île-de-France, où elle peut atteindre six ans maximum ;
– transport ferroviaire (y compris le RER en Île-de-France) : neuf ans maximum.
« En cas de difficultés techniques ou financières graves ou imprévues », la durée peut être prolongée d’un an. « En cas de force majeure », la prolongation peut atteindre trois ans, renouvelable « si les circonstances de force majeure ou leurs conséquences l’imposent ».
Pourquoi certaines gares ne seront pas accessibles ?
Les gares des points d’arrêts non prioritaires ne sont plus soumises à l’obligation de mise en accessibilité.
Franck Seuret
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6 commentaires
Il est désolant que les aménagements de la loi de 2005 repoussent une fois de plus l’accessibilité pour tous…
Toutefois, il ne faut pas désespérer :
Je suis adjointe au maire d’une commune de 1500 habitants, nous sommes une nouvelle équipe qui avons gagné les élection de mars 2014. Nous n’avons pu que constater que le PAVE (plan d’accessibilité de la voirie et des espaces publics) n’avait pas été réalisé. Nous sommes en train de travailler dans ce sens avec un cabinet spécialisé dans le domaine (2ème rendez-vous cet après-midi même !). Les travaux “lourds” seront progressivement réalisés, des petits travaux non coûteux sont d’ores et déjà réalisés.
Certes, je suis malade et en fauteuil et donc très motivée pour booster le conseil municipal, mais je pense que peu à peu la mise en accessibilité fera boule de neige dans les différentes collectivités.
Par ailleurs, j’ai organisé en juin une réunion entre la CCI et les commerçants pour inciter ceux-ci à mettre leurs établissements aux normes : 1ère question, “combien çà va nous coûter si on ne fait pas ?”, 2ème question, “comment faire pour ne pas faire ?”, 3ème question : “qui va contrôler et nous dénoncer?”… sans commentaire…
Dans le domaine médical, le cabinet de kiné ainsi que la pharmacie sont accessibles, le dentiste avec aide, quant aux médecins…
En tant qu’élue, je m’implique, et je déplore que nos prédécesseurs n’aient pas eu la même démarche… La route sera longue et le combat quotidien, gardons l’espoir !
Plutôt de ne rien voir de positif dans l’ordonnance en question, j’apprécie le commentaire et l’engagement de Mafan, adjointe au maire. Depuis plus d’un an, je plaide pour une présence plus active et constructive des représentants des assoc. au sein des Commissions communales (à partir de 5 000 hab): en vain pour ce qui est de mon assoc. et dans mon dépt. 95.
Cest dans le concret et au quotidien que cela peut bouger et bien moins par des manif. nationales (et coûteuses) ou des Collectifs mêle-tout.
Bonsoir, Si on cherche des fautifs dans la non réussite 2005/2015 (pour pas dire depuis le 1975) on y tous dedans (Collectivités avec leurs services techniques, CCI, Associations, Profession de Santé, Bureaux de Contrôle…) mais c’est pas avec la passé qu’on vas avancer car, de plus, il nous apprend “rien”. La réelle question est purement financière ce qui veux dire qu’il y auras encore de retard et DÉROGATIONS sans limite et vont tomber sur des accords TACITES (la plus part ). A la question comment faire pour réussir cette fois? Il y a 2 solutions en parallèle: 1) si on veux vraiment relancer l’économie et avec sa le travail alors il faut faire beaucoup de travaux de mise aux normes accessibilité; 2) Si on veux que ce soit le moins cher possible alors il va falloir appliquer la défiscalisation des travaux avec des vrais contrôles. Comme j’avais déjà dis à plusieurs reprises, depuis le 2010, qu’on arrivera pas à la réalisation en 2015 (la preuve) je dis que les Ad’AP est une USINE A GAS qui fera que, vu les décrets d’applications, de la fumé NOIRE. RDV EN 2020..PEUT ÊTRE …..Au fait à quand un(e) Président(e) de la République en situation de handicap comme Franklin Delano Roosevelt ? …. J’ai presque envie de remercier le Gouvernement pour la longue “réflexion” en faveur d’une MINORITÉ QUI DERANGE….. Et en plus ils sont payés pour sa….MDR
Oui Walter,
C’est pour faire avancer les choses qu’il faut que des handicapés soient candidats dans les instances municipales dans un premier temps, et, soyons fous, départementales et nationales (mais là c’est une autre affaire…).
Pour ce qui est des petites communes comme la mienne (1500 habitants), c’est un peu plus facile d’être élu que dans les grosses communes car on se connait et il n’y a pas de rejet de principe.
Que ce soit cette loi pourrie ou l’engagement fantômes des élus (responsables au plus haut point de ce bordel) c’est du n’importe quoi. Pire : les fraudes (notament en région parisienne , prés de Versailles et alentours) on déjà commencées. Les préfets organisent avec des bailleurs, des constructions attendues pour des personnes handicapées, et quand le logement est enfin visitable, on se rends seulement compte que l’on ne peux même pas y entrer en fauteuil, les portes n’étant pas assez larges ! De qui se moquent on? Entre des architectes verreux qui signent les plans, les gens qui construisent en toute connaissance de cause, et les bailleurs qui ne voient rien jusqu’au dernier moment, lequel d’entre eux encaisse le plus d’argent publique? Pire La moitié des cumulards qui peuple notre assemblées n’applique même pas la loi qu’ils ont voté dans leur “députation”, ni dans leur mairies, et encore moins dans l’assemblée nationale. Comme ça, c’est sur, il n’y aura jamais une personne handicapée élue député qui pourra , au minimum vérifier toutes ces conneries. Vu leurs revenus indécents, c’est une honte de laisser les personnes handicapées dans cette merde , alors qu’eux se trimbalent avec chauffeur, voiture de fonction et des avantages à perte de vue. Quand un salarié de base ne fait pas son boulot, on le vire et on le sanctionne. Pour les élus, on devrait faire pareil… ne leur donner leur salaire qu’une fois le boulot vraiment fait… et certainement pas 23 000 euros par mois… hors avantages
Je suis la première à râler pour les problèmes d’accessibilité par plus tard qu’hier au sujet des transports en commun mais j’ai appris à discuter avec les commerçants parfois de bonne volonté.
Le Mans, carrefour de la Sirène pas loin de la Cité PLANTAGENET autrement dit le Le Vieux Mans. Un magasin pas accessible, la discussion s’engage: “Voilà 7 ans que je demande à faire des travaux mais le site est classé donc refus de la demande de plan incliné”.
“Et si vous le mettiez à l’intérieur” réponse “Cela modifierait le POS” (Plan d’Occupation des Sols), je suppose que la réponse provient de la Mairie.
EXTRAORDINAIRE voire ABRACADABRANTESQUE!!!
Quant aux professions libérales en particulier les médecins ou pour être plus honnête le Conseil de l’Ordre est pour le report des travaux, pas mal non plus (chut) et dire que ce sont les syndicats de médecins qui sont montés au créneau.
Chronique d’une personne ordinaire…à 4 roues