Amendement Creton : 6 000 adultes handicapés en établissements pour… enfants

Publié le 5 janvier 2016 par Franck Seuret
L'amendement Creton permet aux jeunes accueillis dans des établissements pour enfants handicapés d’y demeurer au-delà de l'âge limite, 18 ou 20 ans généralement, dans l’attente d’une place. © Will Clayton

Près de 6 % des personnes accueillies dans des établissements pour enfants handicapés sont de jeunes adultes, révèle une récente étude de la Drees. Mais l’amendement Creton, qui leur permet d’y rester au-delà de l’âge légal, ne leur garantit pas de trouver une place dans une structure adaptée à leurs besoins.

C’est un symptôme supplémentaire du manque de places en établissements et services. Selon une étude de la Drees, rendue publique le 4 janvier, près de 6 000 jeunes adultes, âgés de 18 à 30 ans, étaient accueillis dans des établissements pour enfants handicapés, fin 2010. Soit 20 % de plus qu’il y a quatre ans, lors de la précédente enquête. Ils représentaient 5,6 % des usagers de ces structures. Un point de plus qu’en 2006 (4,6 %).

Un amendement pour ne pas se retrouver exclu du jour au lendemain

Ces adultes bénéficient de l’amendement Creton, adopté en 1989. Cette disposition permet aux jeunes accueillis dans des établissements et services médico-sociaux pour enfants handicapés d’y demeurer au-delà de l’âge limite, 18 ou 20 ans généralement, dans l’attente d’une place dans un autre établissement. Un pis-aller pour éviter qu’ils ne se retrouvent exclus de cette structure, leurs bougies d’anniversaire tout juste soufflées, sans aucune autre solution.

25 % des polyhandicapés de 20 à 30 ans en établissements pour enfants

Les jeunes relevant de l’amendement Creton sont « plus souvent atteints de handicaps lourds », notent les auteurs de l’étude. Plus d’un tiers d’entre eux courent un risque vital en l’absence d’une aide humaine ou technique constante. Les jeunes polyhandicapés sont particulièrement concernés : un quart des personnes polyhandicapées âgées de 20 à 30 ans, soit plus de 800 personnes, sont maintenues dans un établissement pour enfants ! Cette surreprésentation reflète le manque cruel de places pour les adultes atteints de polyhandicap.

graphique age des jeunes CretonUne solution transitoire… qui peut durer

71 % des usagers Creton étaient âgés de 18 à 21 ans au moment de l’enquête ; 6 %, de 25 ans ou plus ; seuls quelques cas exceptionnels (0,5 %), de plus de 30 ans. Le maintien dans ces établissements est en effet « transitoire pour une grande partie des jeunes concernés ». 3 800 en sont ainsi sortis, au cours de la seule année 2010. Les deux tiers avaient 20 ou 21 ans. Mais « plus les jeunes sont lourdement handicapés, plus la sortie peut être tardive » : 10 % des déficients mentaux profonds et 22 % des polyhandicapés relevant de l’amendement Creton avaient 25 ans ou plus au moment de leur sortie.

L’amendement Creton a des effets pervers

Le maintien de ces adultes en établissements pour enfants est inévitable, faute de structures adaptées en nombre suffisant. Mais il reporte le problème sur les plus jeunes, devant attendre plus longtemps que des places se libèrent. Ce qui les prive, parfois, d’une prise en charge suffisamment précoce. De plus, le pourcentage important d’adultes dans des établissements pour enfants – jusqu’à 13 % dans les établissements pour polyhandicapés ! – complique le fonctionnement de ces structures : les besoins ne sont pas les mêmes à 25 qu’à 10 ans…

Au moins 6 % des jeunes sans solution, à la sortie

Enfin, l’amendement Creton ne garantit pas de pouvoir trouver une place. Au bas mot, 6 % des jeunes sortis d’un établissement dans lequel ils étaient accueillis au titre de l’amendement Creton se retrouvent à domicile sans aucune prise en charge ou orientation médico-sociale. Certainement plus – autour de 10 % ? – car « il faut sans doute y ajouter une partie » des réponses imprécises. La mise en place du nouveau dispositif d’orientation par les MDPH, à partir de 2016, permettra-t-il de limiter le nombre de ces personnes sans solution ? Si les moyens dévolus à la création de places et d’établissements n’augmentent pas de manière conséquente, il est permis d’en douter. Franck Seuret

Comment 5 commentaires

il serait bien aussi de prévoir des maisons de retraite spécialiser pour des personnes handicapées et non des maisons de retraite accueillant des personnes handicapées vieillissante car se n’est pas adapter pour eux.

[…] « Près de 6 % des personnes accueillies dans des établissements pour enfants handicapés sont de jeunes adultes, révèle une récente étude de la Drees. Mais l’amendement Creton, qui leur permet d’y rester au-delà de l’âge légal, ne leur garantit pas de trouver une place dans une structure adaptée à leurs besoins. » (lire la suite) […]

Permettez moi de m’étonner du fait que si vous défendez à juste titre, le fait de mettre “personne” devant handicapé, il vous arrive de l’omettre devant polyhandicapé !!

Finalement, cet amendement fait que “toute la chaîne” de prise en charge, du tout petit à l’âge adulte, se trouve bloquée. Ces places libérées permettraient aux enfants d’y prétendre et, du même coup, les petits pourraient bénéficier de prises en charge en SESSAD, CAMPS…où, là aussi, les listes d’attente sont longues. Que de précieux temps perdu dans le suivi et l’évolution des différents handicaps !!! TOUT SIMPLEMENT, INADMISSIBLE !!!

Une réalité cruelle qui vous cloue aux pieds du mur quand toutes les portes (Caj, esat,sas…et bientôt Ime)se ferment devant vous .
Que faire ? Arrêter toutes activités professionnelles pour garder son jeune 24/24
Quelle régression?
Qu’est ce qu’on attend pour créer , construire rénover de nouveaux établissements pour tous ces jeunes et moins jeunes handicapés?
Où va l.argent public dont disposent les associations entre autres..?
Une maman désemparée….

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