Manque d’établissements : « Ça fait trois ans qu’on attend une place pour notre fils. »
PRESIDENTIELLE 2017. Plusieurs dizaines de milliers d’adultes et d’enfants handicapés ne disposent d’aucune solution d’accompagnement, que ce soit en établissements ou en services. Comme Jérémy, 13 ans. Sa mère, Christine Perruche, est contrainte d’assurer sa scolarisation à domicile en attendant qu’une place en IME se libère.
« Ce n’est pas une vie, ni pour nous, ni pour Jérémy. » Christine Perruche oscille entre colère et tristesse. Voilà trois ans que son fils, désormais âgé de 13 ans, attend d’intégrer un établissement, un institut médico-éducatif (IME). Depuis que la famille a déménagé en Saône-et-Loire.
Faute de place en établissement, la Maison départementale des personnes handicapées lui a demandé de faire l’école à Jérémy, à domicile. « Alors que ce n’était pas du tout mon choix », précise-t-elle. Aujourd’hui, la direction des services départementaux de l’Éducation nationale – l’ex-Inspection académique – veut venir contrôler la réalité de l’enseignement dispensé. Une histoire à dormir debout comme en vivent, avec des variantes plus ou moins douloureuses, les parents d’enfants handicapés et les adultes en attente d’une place en établissement ou en service.
33 500 personnes handicapées sans solution selon l’Unapei
Combien sont-ils exactement ? Impossible de le savoir faute de base de données nationale. En septembre 2015, l’Unapei évaluait à 33 500 le nombre de personnes sans solution, dans son seul réseau (déficience intellectuelle, maladie mentale et autisme, principalement). Un chiffre regroupant 12 500 enfants et 21 000 adultes, sans compter ceux attendant une place en établissement et service d’aide par le travail ou en entreprise adaptée.
En 2013, sur la base d’un recensement précis effectué en Vendée par le conseil départemental, Faire Face estimait que 19 500 enfants se trouvaient sans solution.
6 000 jeunes adultes maintenus dans des établissements pour enfants
D’autres indicateurs montrent l’étendue du problème. Selon une récente étude de la Drees, 6 000 jeunes adultes âgés de 18 à 30 ans étaient accueillis, fin 2010, dans des établissements… pour enfants handicapés. Soit près de 6 % des usagers de ces structures. Ces jeunes, souvent atteints de handicaps lourds, sont maintenus là, faute de places en structures pour adultes.
7 000 Français exilés en Belgique
Par ailleurs, 1 450 enfants et 5 400 adultes étaient accueillis en Belgique, en 2015. Un décompte effectué par les deux sénateurs ayant rédigé un rapport d’information sur le sujet. Certes, le gouvernement s’est engagé, en 2016, à ce que les personnes handicapées ne soient plus orientées en Belgique contre leur gré. Mais les moyens dégagés demeurent insuffisants, selon les sénateurs.
4 000 places créées en France chaque année
Pourtant, bon an mal an, près de 4 000 places sont créées en France chaque année, pour adultes et enfants handicapés. 60 % en établissements (IME, par exemple), 40 % en services (exemple : Sessad intervenant à domicile). Mais ce chiffre inclut les transformations, qu’il s’agisse de reconversion de places d’établissements en services ou de changement du public accueilli. Elles représentent en moyenne un quart des places officiellement créées, note la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Ce qui limite d’autant l’augmentation du parc, ces places existant déjà auparavant mais changeant simplement d’affectation.
De plus, une partie des créations sert à absorber la croissance démographique. Les listes d’attente se résorbent donc lentement. Bien trop lentement, pour Christine Perruche : « On voudrait enfin que Jérémy ait une vie, qu’il ait des petits camarades. » Franck Seuret
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