Jeunes aidants, la double vie
De nombreuses enquêtes portent sur les aidants familiaux. Notamment à l’occasion de la Journée des aidants, ce 6 octobre. Rares sont celles à s’intéresser aux plus jeunes d’entre eux. Pourtant, ils existent. Novartis et Ipsos viennent de rendre publics les résultats d’une étude sur les 13-30 ans. Le profil peu connu des jeunes aidants se dessine avec plus de précision et demande des actions.
Ce sont des enfants, des adolescents et de jeunes adultes avec déjà de grandes responsabilités. En plus des jeux, de l’école, des copains…, ils s’occupent d’un de leur proche malade, en situation de handicap ou de dépendance. Avec de lourdes conséquences sur leur vie quotidienne. L’enquête Novartis-Ipsos intitulée “Qui sont les jeunes aidants aujourd’hui en France ?”, auprès de 500 jeunes de 13 à 30 ans l’illustre.
Aide à un parent gravement malade
L’étude s’intéresse d’abord aux plus jeunes d’entre eux : les 13-16 ans au moment de l’enquête, certains ayant assumé leur rôle avant. Dans cette tranche d’âge, les deux tiers consacrent au moins une heure par jour à un proche. La moitié sont au collège, un tiers au lycée et 14 % ont déjà un pied dans la vie professionnelle. La grande majorité (72 %) aide un de ses deux parents atteint d’une maladie grave.
Fatigue physique, stress psychologique
L’enquête mesure également les conséquences physiques et psychologiques qu’entraine ce rôle de jeune aidant. Difficultés d’endormissement, réveils nocturnes et maux de dos, entre autres. Plus de la moitié (59 %) déclarent se sentir fatigués.
Quant à l’impact psychologique, il se traduit notamment par un sentiment de stress et de surcharge importante au quotidien (31 %). S’y ajoute l’impression de ne pas pouvoir profiter de sa jeunesse (38 %).
Aide morale, matérielle, intime
Sur tout l’échantillon des répondants de 13 à 30 ans, l’enquête Novartis-Ipsos met en lumière le type d’aide qu’apportent ces jeunes. Si elle demeure morale pour les deux tiers, plus de la moitié s’occupent de tâches matérielles (courses, ménage… ) quand d’autres aident leur proche malade, handicapé ou dépendant dans ses déplacements (43%), sa prise en charge médicale (43%) ou ses tâches administratives (33 %). À souligner qu’un sur cinq doit gérer l’intimité de la personne aidée : toilette, habillement, douche… Et qu’un sur trois apporte l’aide seul.
« Cette population était jusqu’alors ignorée des statistiques, souligne Bénédicte Kail, conseillère nationale éducation famille à l’APF et membre du comité scientifique ayant contribué à la réalisation de cette enquête. Savoir, par exemple, qu’un tiers d’entre eux aident seuls un parent, y compris parfois pour des aspects médicaux ou intimes, non seulement interroge mais nécessite une prise de conscience par les pouvoirs publics, les établissements scolaires… et la mise en place d’accompagnements spécifiques. »
Répercussions positives et négatives
Une très grande majorité met en avant des apports valorisants liés à sa situation. Arrivent en tête la maturité (82 %) et le fait de mieux comprendre les adultes (84 %). Mais ils ne font pas oublier les retentissements sur les études ou l’emploi avec des retards et des absences ou sur la vie sociale : quasi la moitié n’invitent jamais leurs copains à la maison. Presque la moitié aussi (47 %) se disent gênés par le regard des autres.
Besoin d’échanger avec des pairs
Quant à ce qu’ils espèrent, c’est pour un sur deux (46 %) de l’aide pour s’occuper de la personne qu’ils accompagnent au quotidien. Celle-ci pourrait, selon eux, prendre la forme d’échanges avec d’autres dans la même situation, un soutien familial et aussi celui de l’école. Valérie Di Chiappari
*Enquête réalisée du 2 au 10 juin 2017 auprès d’un échantillon de 501 jeunes aidants âgés de 13 à 30 ans interrogés par Internet. 216 apportaient de l’aide au moment de l’enquête et 285 en avaient apporté par le passé.
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