Groupe, rock et handicap : l’uppercut Percujam
En salles à partir de ce mercredi 4 avril, le film Percujam nous embarque dans l’aventure d’un groupe de rock atypique composé d’artistes autistes et d’éducateurs. Magie de la musique : sur scène, impossible de savoir qui est handicapé. Attention : vous allez taper du pied et fredonner !
Ils sont bluffants. Ils dégagent une énergie intense. À se demander si l’autisme – lorsqu’ils le domptent par la musique – ne décuple pas leurs talents. Les Percujam existent depuis vingt ans. Mais leur notoriété, à la faveur du documentaire éponyme qui sort ce mercredi en salles, a pris de l’ampleur ces derniers mois. Pour une raison évidente : ce film donne envie d’aller les voir en concert.
Alternote, foyer unique au monde
Sur scène, ils sont quinze, neuf artistes autistes et six éducateurs musiciens. Tous travaillent dans un foyer d’accueil médicalisé (Fam) unique au monde, Alternote, à Antony dans les Hauts-de-Seine. C’est là que le réalisateur Alexandre Messina (lire ci-dessous) a posé sa caméra pendant quatre ans, de 2012 à 2016. Il a capté leur quotidien, leur travail en studio, leur passion pour la musique, et une parole – forcément inhabituelle à nos oreilles – sur leur métier.
On embarque avec eux en tournée sur les routes de France, on rit et on s’attache à ces rockeurs festifs dotés d’une différence qui nous interpelle. Kévin, le fan de culture américaine. Gilou, la mascotte. Milène et ses mots sans queue ni tête, scandés à la manière d’une poétesse.
Contrastes au quotidien
Dans les scènes du quotidien, l’autisme apparaît ainsi dans toutes ses manifestations : mouvements incontrôlés, paroles incohérentes, angoisses et absences silencieuses de ces jeunes soudains perdus dans leur monde. Le contraste avec les scènes musicales – au moment de composer, en répétition, en concert – est saisissant : de handicap, il n’y a plus. Nous voici incrédules et admiratifs devant leur capacité de concentration et d’apprentissage, leur sens du rythme, leur aisance à jouer d’un instrument.
C’est Jean-Rodrigue dont les doigts glissent, fluides, sur les touches du piano. Et qui, dans la scène suivante, porte péniblement sa fourchette à sa bouche. C’est Kévin, face caméra, qui dit son « rêve d’être chanteur » avec son langage en désordre. Et qui, au plan d’après, apprend – et traduit même – les paroles d’une chanson espagnole. Comment même ne pas voir en Raphaël, qui joue du violon depuis l’âge de 7 ans, de la batterie, de la basse et chante, un “Rain Man” de la musique ?
De l’émotion à fond
Comment ces artistes gèrent-ils leur handicap pour parvenir – avec ce talent, cette énergie et un tel plaisir – à créer ? Percujam ne l’explique pas car ce n’est pas un film sur l’autisme. C’est un film sur la musique et son pouvoir de nous mettre en relation les uns avec les autres au-delà de nos différences. C’est ce que font les musiciens de Percujam, alors même que leur handicap les porte en principe à l’isolement.
« Même sans bien connaître l’autisme, je me dis que les personnes qui en sont atteintes ont du mal à gérer leurs émotions. Alors c’est vraiment surprenant de voir comment les Percujam nous en font ressentir de si fortes à travers leur passion du son, témoigne Joachim qui a assisté à une avant-première en mars au Max Linder à Paris. Percujam ça m’a donné envie de saisir une guitare électrique et de chanter à tue-tête. »
Du rock diablement entraînant
Leur rock alternatif est aussi diablement entraînant. Pour ne pas dire entêtant. « Artistes autistes, une lettre d’écart / artistes autistes, une note d’espoir » Autant vous prévenir : vous allez scander ce refrain pendant quelques heures après avoir vu Percujam sur écran… ou en live. Aurélia Sevestre
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Alexandre Messina, réalisateur : « Ils sont beaucoup plus libres que nous. »
Lorsqu’une éducatrice, amie de son frère, lui propose d’assister à une répétition du groupe Percujam en 2012, Alexandre Messina s’y rend « sans arrière-pensée, mais en m’attendant quand même à voir des particularités. Je ne savais pas ce qu’était l’autisme. Et je ne le sais sans doute pas plus aujourd’hui. Ce jour-là, je n’ai pas vu d’autistes. J’ai vu des musiciens. Jusqu’à ce qu’ils s’arrêtent de jouer. »
Percujam, son film, s’achève en apothéose par un concert à l’Olympia en 2016. C’était « le rêve » que Kevin, l’un des musiciens, lui avait confié face caméra dès les premiers tournages. Un documentaire en forme de success story ? Le réalisateur s’en défend. « Je n’ai pas cherché à éluder les problématiques. Aujourd’hui, les propositions affluent mais Percujam ne peut faire huit concerts par mois : ses musiciens ont tous des angoisses qui peuvent surgir à n’importe quel moment, aucun déplacement n’est simple. »
On l’oublierait presque à voir ses images, tant la musique semble tout y remettre « en ordre ». Et nous mettre en lien avec ces artistes particuliers. « J’ai moi-même appris à communiquer avec eux, confie le réalisateur. Et j’ai découvert qu’ils sont beaucoup plus libres que nous. »
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1 commentaire
Ils sont tout simplement magnifiques et je pense que si le film est réussi c’est que Monsieur Messina a su les apprivoiser car sinon il n’aurait rien obtenu. En concert ils sont tout simplement incroyables. Chaque fois que je vais à un concert de Percujam celui-ci à un goût de peu tant on resterait là pour écouter encore une chanson. C’est magique Percujam donne de l’espoir à beaucoup de parents qui ont des enfants autistes. Merci Monsieur Messina pour ce super film, Merci Alexandra Lederman, Merci Alain Miro et surtout Merci à Percujam Merci de partager un moment de votre vie avec nous. Film a voir absolument…