PCH : le financement du reste à charge pourrait être testé dans cinq à dix départements

Publié le 18 mai 2018 par Franck Seuret
L'expérimentation durera trois années. Il faudra donc attendre au moins 2021 pour qu’un droit acquis en 2005 finisse par s’appliquer.

L’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi modifiant la PCH sur deux points. La suppression de l’âge limite de 75 ans pour demander cette prestation est unanimement saluée. Le lancement d’une expérimentation sur le financement du reste à charge, beaucoup moins.

Enfin ! Pour la première fois depuis treize ans, un texte législatif est en passe de faire évoluer la PCH. La prestation de compensation du handicap est un acquis essentiel de la loi de 2005. Mais, dans sa forme actuelle, elle est loin de répondre aux besoins des personnes en situation de handicap.

Jeudi 17 mai, l’Assemblée nationale a donc adopté la proposition de loi de Philippe Berta. Le député Modem veut supprimer la barrière d’âge de 75 ans au-delà de laquelle il n’est plus possible de demander la PCH. De plus, il souhaite lancer une expérimentation pour limiter le reste à charge des bénéficiaires. Il aura donc fallu attendre bien longtemps… pour deux mesures de portée modeste.

Le député Philippe Berta a obtenu l’adoption de sa proposition de loi.

8 600 bénéficiaires au-delà de 75 ans

Aujourd’hui, il existe deux limites d’âge. La première est fixée à soixante ans. Les femmes et les hommes dont le handicap survient après ne peuvent prétendre à la PCH. Ce couperet s’avère particulièrement pénalisant. Il semble encore moins pertinent depuis que l’âge légal de la retraite a été reculé à 62 ans.

En revanche, une personne qui remplissait les conditions avant 60 ans a jusqu’à son 75e anniversaire pour demander la PCH. C’est la deuxième limite d’âge. Celle que Philippe Berta veut donc supprimer.

Cette avancée est unanimement saluée par les associations de personnes handicapées. Mais elle concernera très peu de bénéficiaires : 8 600 selon la Drees, pour un coût annuel de 69 millions d’euros. Soit moins de 7 millions par département, en moyenne.

Des fonds départementaux pour financer le reste à charge

La seconde mesure est plus controversée. Philippe Berta propose de lancer une expérimentation de trois années, dans les départements volontaires, sur le financement du reste à charge par les fonds départementaux de compensation (FDC).

La loi de 2005 a mis en place ces FDC. Leur mission : accorder des aides financières aux personnes handicapées pour faire face aux frais de compensation restant à leur charge, après déduction des autres financements obtenus. Exemple : votre fauteuil roulant coûte 10 000 €. La PCH, la Sécurité sociale et votre mutuelle en prennent 75 % en charge, soit 7 500 €. Vous pouvez alors solliciter votre FDC pour financer tout ou partie du solde de 2 500 €.

Le reste à charge ne devra pas excéder 10 % des ressources du bénéficiaire de la PCH.

De fortes inégalités entre départements

La loi de 2005 fixe même un seuil. Le reste à charge final ne peut, sous certaines limites, « excéder 10 % de leurs ressources personnelles nettes d’impôts [les ressources des personnes handicapées, NDLR] dans des conditions définies par décret ». Or, ce dernier n’est jamais sorti. Quand bien même le conseil d’État a condamné, en 2016, le Premier ministre à prendre ce décret.

Résultat : faute de cadre national, les pratiques restent très variables d’un département à l’autre. « Manifestement, il vaut mieux être handicapé dans certains départements que dans d’autres, ce qui est inacceptable », souligne Philippe Berta.

Une expérimentation « pour sortir de l’impasse »

Mais la rédaction ambigüe de certaines dispositions de l’article de loi a, jusqu’à présent, rendue impossible la rédaction de ce décret, plaide-t-il. Pour « sortir de l’impasse », il propose donc de mettre en place une expérimentation. À son terme, le dispositif sera généralisé pour  «  limiter le reste à charge des bénéficiaires de la PCH et harmoniser le fonctionnement des FDC », promet-il. Il faudra donc attendre au moins trois années de plus, soit juin 2021, avant qu’un droit défini en 2005 ne s’applique. La pilule est dure à avaler…

Un dispositif restrictif

Surtout que les conditions de l’expérimentation sont assez restrictives. Seuls cinq à dix départements devraient y prendre part selon Philippe Berta. De plus, la couverture du reste à charge se fera « dans la limite des financements » des FDC. Autrement dit, la règle des 10 % maximum restant à charge ne sera pas impérativement respectée. Et seuls pourront y prétendre les bénéficiaires de la PCH dont les ressources sont inférieures à un certain plafond. Quel sera son montant  ? Mystère pour le moment.

L’aide humaine concernée  ?

D’autres questions restent en suspens. Les restes à charge des cinq volets de la PCH, et notamment l’aide humaine, rentreront-ils dans le dispositif ? Un décret doit fixer « le champ et les modalités de mise en œuvre et d’évaluation de cette expérimentation ». L’expérimentation devrait démarrer le 1er janvier 2019… sous réserve que le Sénat adopte également le texte.

Les associations demandent un plan d’urgence

Pour APF France handicap, le CFPSAA, le GIHP, l’Unafam, et Unapei, cette proposition de loi ne peut être « qu’un début ». Elles « demandent la mise en place en urgence d’un grand chantier sur le droit à la compensation avec les représentants de l’État, des conseils départementaux et des associations représentatives des personnes en situation de handicap et de leurs familles pour un  véritable plan Marshall de la compensation. »

Comment 8 commentaires

Pour moi,la paraplégie m’a coûté 40000€ avec une prise en charge tout compris de 19000€.il y a intérêt d’être fortuné quand on est victime d’un handicap

Hé, Un plan Marshall OUI, mais pourquoi avec les associations REPRESENTATIVES des personnes handicapés ? Que ces associations relisent la convention ONU, ce ne sont pas des syndicats mais des associations et à eux cinq elles ne représentent pas 12 millions de personnes en situation d’handicap! Donc merci de rectifier votre article en supprimant “représentatives” par “et les REPRESENTANTS des associations de personnes en situation d’handicap”

si votre handicap est reconnu par la MDA c’est à elle que vous devez faire la demande si vous travaillez avec la reconnaissance travailleur handicapé l’agefiph

Cordialement

Issu de la loi du 11 février 2005, l’article L 146-5 du Code de l’action sociale et des familles dispose que « Les frais de compensation restant à la charge du bénéficiaire de la prestation prévue à l’article L. 245-6 ne peuvent, dans la limite des tarifs et montants visés au premier alinéa dudit article, excéder 10 % de ses ressources personnelles nettes d’impôts dans des conditions définies par décret. ». Ceci devant permettre le financement d’aides techniques, et l’aménagement du logement et/ou du véhicule pour les personnes se trouvant dans l’obligation d’y avoir recours pour faciliter leur autonomie.

Or, huit ans plus tard, l’Inspection générale des affaires sociales, dans un rapport publié en avril 2013, recommandait au Gouvernement de : « Prendre le décret d’application de l’article L. 146-5 du CASF pour déterminer les conditions de calcul des restes à charge des personnes handicapées après intervention des fonds départementaux de compensation. »

Une association, l’ANPIHM, a déposé par la suite un recours auprès du Conseil d’État.

Le 24 février 2016, le Conseil d’État ordonnait la publication du dit décret dans le délai de 9 mois et condamnait l’État à verser une astreinte par jour de retard au requérant au-delà de ce délai.

Avec l’article 2 de la proposition de loi Berta, alors que depuis 13 ans l’État s’est refusé à honorer la volonté du législateur, demande 3 années supplémentaires pour examiner, de manière partielle sur le territoire, la possibilité éventuelle de souscrire à l’obligation légale, ce dans le cadre du budget alloué, budget qui s’est toujours révélé très insuffisant…

Au lieu de se féliciter de la loi Berta et de s’en remettre à un hypothétique «plan d’urgence », il vaut mieux dans l’immédiat demander le retrait de l’article 2 de cette loi et le respect de la décision du conseil d’État imposant la publication du décret prévu par la loi de 2005.

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