3e plan maladies rares : entre satisfaction et scepticisme
Le troisième plan national Maladies rares (PNMR3) a été annoncé mercredi 4 juillet 2018. Si les filières Maladies rares l’ont globalement accueilli avec satisfaction, elles affichent néanmoins un enthousiasme prudent. Entretien avec le Pr Christophe Verny, coordinateur de l’une de ces 23 filières, Brainteam.
Faire Face.fr : Le 3e plan national Maladies rares (PNMR3) et ses ambitions déclinées en onze axes ont été jugés prometteurs. Quels sont les principaux points de satisfaction ?
Pr Christophe Verny : Je retiendrais d’abord l’importance donnée au diagnostic. Réduire l’errance et l’impasse diagnostiques est le premier axe cité dans le plan. Aujourd’hui, nous avons les connaissances et les techniques pour réaliser bien plus de diagnostics et bien plus tôt. Mais il nous manque les financements. Par exemple, pour accéder aux plateformes de séquençage à très haut débit pour les diagnostics en routine. Elles restent cantonnées aux laboratoires de recherche.
Autre point positif du PNMR3 : le renforcement du rôle des filières de santé maladies rares dans toutes leurs missions. À savoir la promotion de la recherche et de l’innovation, notamment via la participation aux banques de données. Également, la formation et l’information des professionnels. Et encore la coordination des équipes de soin…
Les filières sont aussi désormais officiellement saisies de la question de l’offre diagnostique. Ce qui est logique, mais jusqu’ici cela n’entrait pas, ou peu, dans leur champ de compétence.
Des crédits Maladies rares pas toujours affectés aux centres de référence
F-F.fr : L’enthousiasme reste pourtant mesuré. Comment expliquez-vous ce scepticisme ?
Pr C.V : Ce plan était très attendu et il est globalement très positif. La logique est bonne et tout ou presque est financé, avec un fléchage précis. Mais l’expérience montre que rien ne permet d’assurer que ces financements arriveront à destination (voir article Mais où sont passés les crédits Maladies rares?). La loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) est telle que les directions hospitalières sont « incitées » à utiliser les fonds en ce sens mais pas « contraintes ».
Or, la situation est tellement tendue dans certains hôpitaux que les crédits Maladies rares servent à colmater les déficits. Si cela perdure, le PNMR3 sera dépossédé de ses moyens. D’autant que même lorsque ces fonds sont affectés aux centres de référence, ils servent souvent à payer du soin pur.
Par exemple la consultation d’un patient atteint d’une maladie rare, alors que celle-ci devrait être prise en charge par l’Assurance maladie. Prendre cette part du salaire du médecin sur les crédits Maladies rares ampute les budgets destinés aux missions de coordination, recherche, formation…
Peu d’argent de l’État accordé à la recherche
F-F.fr : L’Association française contre les myopathies (AFM) juge, elle, ce plan “loin des enjeux”. Quel est votre sentiment ?
Pr C.V : Si l’on parle du budget alloué à la recherche, je comprends sa position. Il ne représente que 20 millions d’euros sur un total de 700 millions, sur cinq ans. Autrement dit, le coup de pouce de l’État consacré à la recherche sur les maladies rares est de quatre millions par an quand celui de l’AFM-Téléthon est de 60 à 70 millions…
L’implication du ministère de la Recherche pourrait être plus ambitieuse. Par exemple à travers des appels d’offres thématiques. L’AFM-Téléthon craint aussi, et je partage cet avis, que ce plan ne mette en place une usine à gaz de commissions et groupes de travail, alors que certains étaient déjà constitués et efficaces.
Une dernière inquiétude concerne le pilotage du plan. Anne Chevrier, qui a fait un travail exceptionnel à la tête de la mission Maladies rares, a quitté ce poste. La Direction générale de l’offre de soins (DGOS) continue de piloter la mission mais il n’y a, à ma connaissance, toujours pas de nouveau chef de mission, ni même d’adjointe. Au moment du lancement de ce PNMR3, et à la veille de relabellisation des filières Maladies rares, nous attendons donc avec impatience la nouvelle équipe.
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3 commentaires
4 millions par an pendant 5 ans, on ne demande pas l’aumône. Pourquoi pas une loterie comme celle organisée pour les monuments en péril … ?
bonjour Thierry,
La réponse est dans votre question malheureusement. On parle santé, ils parlent chiffres.
Les monuments en péril, une fois réhabilités, deviennent “valides” pour quelques années (c’est un investissement rentable).
…Alors que nous sommes voués à l’extinction à la vitesse de la lumière dès lors qu’on est atteint de maladies rares et/ou de handicaps associés.
Pour tous les politiques, cela ne vaut pas la peine “d’investir” pour nous. …au contraire, notre disparition plus rapide leur permet de faire des économies sur le plan budget de la santé, pensions, adaptation des structures et matériel, mdph, etc
Nous ne sommes, et nous ne seront jamais, ni une priorité, ni un sujet digne d’intérêt (sans jeux de mots intérêts)
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