AAH : seulement dix années de sursis pour le complément de ressources

En novembre 2019, le complément de ressources de l’AAH va disparaître. Mais les quelque 70 000 personnes qui le perçoivent déjà pourront continuer à en bénéficier jusqu’en 2029.

Ci-gît le complément de ressources. Mais sur la future pierre tombale de ce complément d’AAH, dont la disparition programmée avait été annoncée en septembre 2017, deux dates apparaîtront.

La première, novembre 2019, restera comme la date officielle de sa disparition. Il ne sera alors plus attribué à aucun nouvel allocataire. La seconde est plus lointaine : novembre 2029. « Les personnes qui bénéficiaient du complément de ressources (CR) en novembre 2019 pourront le toucher pendant dix années encore si elles continuent à remplir les conditions d’éligibilité », a annoncé Sophie Cluzel, ce lundi 24 septembre, lors d’un point presse. Près de 70 000 personnes sont concernées.

104 € au lieu de 179 €

Ensuite, seule subsistera la majoration pour la vie autonome (MVA). Pour les nouveaux allocataires, à partir de novembre 2019. Pour les anciens, à compter de novembre 2029. Mais son montant (104,77 €) est moins élevé que celui du CR (179,31 €). Ils perdront donc 75 €. Virtuellement pour les premiers, réellement pour les seconds.

Pas de perte de pouvoir d’achat

Pour faire passer la pilule, cette suppression intervient en même temps que la revalorisation de l’AAH. En novembre 2018, le montant de cette dernière passera à 860 €. Puis à 900 € en novembre 2019.

Sauf exceptions, les bénéficiaires du CR ne perdront donc pas de pouvoir d’achat : la revalorisation de 90 € est plus élevée que la perte de 75 €. Mais ils en gagneront moins, au bout de dix années, que ce que la promesse d’Emmanuel Macron pendant la campagne – l’AAH au-delà de 900 € – leur avait fait espérer.

Une mesure de simplification

Pour le cabinet de Sophie Cluzel, il s’agit d’une mesure de simplification. « Il ne sera plus nécessaire de solliciter une évaluation de la capacité de travail en complément de l’évaluation de l’incapacité », avance-t-il. Seuls les allocataires ayant une capacité de travail inférieure à 5 % sont en effet éligibles au CR.

Un acquis de la loi de 2005

« Pour alléger la tâche des Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), le gouvernement sacrifie des dizaines de milliers de citoyens sévèrement handicapés », dénonce Véronique Bustreel, la conseillère nationale ressources d’APF France handicap.

La suppression du CR sonne en effet le glas de la garantie de ressources, instituée par la loi de février 2005. Elle était composée de l’AAH et du complément de ressources. Elle visait à compenser l’absence durable de revenus d’activités de la personne handicapée dans l’incapacité de travailler.

« Le maintien des droits pendant dix ans est insuffisant. »

« Et le maintien des droits pendant dix ans est insuffisant, poursuit-elle. Le gouvernement ne prend pas en compte le fait que la capacité de travail de ces personnes est extrêmement réduite, voire inexistante. Il est donc impossible que leur situation s’améliore dans les dix années à venir », poursuit Véronique Bustreel.

« Prolonger son versement pendant une durée illimitée n’aurait pas été tenable, juridiquement, répond le cabinet de Sophie Cluzel. Il n’est pas possible de justifier indéfiniment que des personnes dans la même situation bénéficient de traitements différents, selon la date à laquelle elles ont fait valoir leurs droits pour la première fois. Cela constitue une rupture d’égalité. »

Les propriétaires privés de complément

Pour Véronique Bustreel, il y a plus grave encore. « Certaines personnes, qui touchaient le complément de ressources, ne vont pas remplir les critères pour prétendre à la majoration pour la vie autonome », pointe-t-elle. La MVA est en effet conditionnée au fait de percevoir une aide au logement. Ce qui n’est pas exigé pour le CR. Dans dix ans, les propriétaires allocataires de l’AAH vont donc se retrouver sans complément d’AAH, quel qu’il soit. Et dix années, cela passe vite.

Qui peut bénéficier de la majoration pour la vie autonome ?

160 000 personnes bénéficient de la MVA. Elles remplissent ces cinq conditions :

– percevoir l’AAH à taux plein ou en complément d’un avantage vieillesse ou d’invalidité ou d’une rente accident du travail ou l’allocation supplémentaire d’invalidité ;

– avoir un taux d’incapacité au moins égal à 80 % ;

– disposer d’un logement indépendant ;

– percevoir une aide au logement ;

– ne pas toucher de revenu d’activité.