Les femmes handicapées arrachent les violences au silence
Les femmes handicapées sont, plus que les autres, victimes de violences. Une pièce de théâtre vient d’être créée sur le sujet. Le Grenelle des violences conjugales a débouché sur des mesures spécifiques, en novembre. Et le Sénat a adopté une résolution pour aller plus loin.
« Je ne savais pas ce que je pouvais accepter ou refuser. » Des années plus tard, Sarah prend conscience qu’un ami de son frère l’a violée. Lorsqu’elle reconnaît l’odeur de son parfum dans une boutique, elle doit « s’accrocher à l’étagère pour ne pas tomber ». Elle qui avait enfoui cette histoire dans sa mémoire la voit ressurgir dans toute son horreur.
51 % des femmes autistes ont été violées
Sarah est l’un des deux personnages autistes de la pièce Les claques et les étoiles, présenté à Lyon, pour la première fois, mardi 14 janvier. Un spectacle de sensibilisation sur les violences, sexuelles notamment. Celles que subissent les femmes autistes, en institutions spécialisées ou en milieu ordinaire. Elles y sont en effet surexposées.
Selon une étude réalisée en 2018 auprès de femmes autistes sans troubles du langage, 88 % d’entre elles disent avoir connu un ou plusieurs contacts sexuels non désirés au cours de leur vie. La première violence a eu lieu avant 14 ans, pour la moitié d’entre elles. Et 51 % de ces femmes ont été violées.
« En danger sans s’en rendre compte. »
« Nous avons la spécificité de ne pas comprendre les sous-entendus ou l’implicite, précise Marie Rabatel, elle-même autiste, engagée depuis plusieurs années dans le combat pour la prévention. Nous ne comprenons donc pas toujours exactement ce que l’autre attend de l’interaction. C’est ainsi que nous pouvons nous retrouver dans une situation de danger sans nous en rendre compte. Les agresseurs le comprennent bien et ne ciblent pas leurs proies au hasard. Ces prédateurs sont experts pour détecter la vulnérabilité. »
Une pièce basée sur l’expérience des femmes
« Survivante de crimes sexuels et de diverses formes de violences », Marie Rabatel a initié l’étude menée en 2018 avec le psychiatre David Gourion et la psychologue Séverine Leduc. Et les auteures de la pièce Les claques et les étoiles, Léa Good et Dcaius, se sont notamment appuyées sur plusieurs entretiens avec elle.
Aucun film sur le sujet
La question des violences sexuelles sur les femmes handicapées est longtemps resté sous les radars. Ce spectacle vient donc combler un vide. Lorsque l’association de lutte contre les violences sexistes Filactions a voulu organiser un débat, elle n’a trouvé aucun film documentaire ou de fiction sur le sujet.
Elle s’est donc associé au Planning familial 69, qui mène un programme d’éducation à la vie sexuelle dans les établissements médico-sociaux, pour commander cette création au Collectif de l’âtre. Aujourd’hui, la pièce existe, prête à tourner, à la demande (*).
Un centre ressources handicap et sexualité dans chaque région
Une captation sera diffusée à l’Assemblée nationale, en avril. « La délégation aux droits des femmes a accepté d’organiser une projection qui sera suivie d’un débat », explique Marie Rabatel. Une victoire, symbolique, après une victoire, politique, en novembre dernier.
Les associations de personnes handicapées ont en effet réussi à profiter du Grenelle des violences conjugales pour faire reconnaître cette problématique particulière par le gouvernement. Une des mesures prévoit la création d’un centre ressources, dans chaque région, sur le handicap et la sexualité. Reste à espérer que les moyens financiers suivent.
Réformer l’AAH pour lutter contre les violences
Le 8 janvier, le Sénat a adopté une résolution pour « dénoncer et agir contre les violences faites aux femmes en situation de handicap ». Il demande, entre autres, « un véritable effort » en matière d’éducation à la sexualité, la désignation de référents dans les établissements, etc.
Mais les sénateurs considèrent aussi que « l’autonomie des femmes en situation de handicap est un pré-requis pour les protéger des violences ». Ils appellent donc à engager une réflexion sur l’allocation adulte handicapé.
En effet, aujourd’hui, la prise en compte des ressources du conjoint pour calculer le montant de l’AAH rend la personne handicapée dépendante de lui. La lutte contre les violences passe aussi par là.
(*) La prochaine représentation aura lieu au cinéma Paradiso, à Saint-Martin-en-Haut (69), le dimanche 9 février.
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1 commentaire
Les ressources du conjoint ne doivent plus etre prises en compte pour le calcul aah.pour ma part j ai subi violences conjugales et humiliations quotidienne je ne parle pas des souffrances quotidiennes que j ai subit, la méchanceté du conjoint qui ne supportait plus l image de femme handicapée que j etais et qui s est aggravee depuis.il a fini par me quitter a m abandonnant a mon triste sort.les femmes ha3sont vulnérables et les femmes handicapées plus que les autres