Décret réduisant l’éligibilité au chômage partiel des personnes vulnérables : la riposte

Publié le 29 septembre 2020 par Élise Descamps
Le collectif Vulnérables sacrifiés mène une campagne de lobbying pour revenir au précédent décret.

Le décret n°2020-1098 ne passe pas. Adopté le 29 août dernier, il a réduit la liste des personnes éligibles à un arrêt de travail ou à une mesure de chômage partiel. Pétition, communiqués, recours en justice : depuis un mois la riposte des personnes s’estimant toujours vulnérables s’organise.

« Protégeons les vulnérables face au Covid-19, le certificat d’isolement doit être prolongé », exhorte une pétition aux 37 000 signataires. Elle date du lendemain du décret réduisant les pathologies éligibles aux chômage partiel et ne le permettant plus aux cohabitants. Son auteur : un certain collectif dénommé “Vulnérables sacrifiés”. Son destinataire : Olivier Véran, ministre de la Santé. Sa demande : abroger le décret n°2020-1098 du 29 août. Et revenir au décret n°2020-521, a minima jusqu’au 31 décembre.

Collectif créé sur Facebook

Ce collectif est né sur les réseaux sociaux. Notamment via le groupe Facebook privé Personnes vulnérables en isolement, comptant près de 600 membres. « Nous sommes cinq, entre la vingtaine et la cinquantaine. Nous sommes des personnes vulnérables ou des proches, dont la pathologie est sortie ou non du décret », indique Jessica Scemama, qui a fédéré ce collectif.

L’étudiante de 22 ans en master communication à Paris précise qu’aucun d’eux n’est militant dans une association ou un parti politique. « À titre personnel, je ne suis pas concernée. Mais cette situation me révolte, indique-t-elle. En juillet, en cherchant des réponses pour une personne de mon entourage, j’ai découvert la détresse des personnes qui allaient devoir se mettre en danger. »

Campagne de témoignages

Selon elle, les garanties des ministres de la Santé et du Travail sur la sécurisation des retours au travail ne correspondent pas à la réalité. Surtout, la liste réduite des pathologies a été émise par le Haut conseil de la santé publique le 23 juillet, bien avant l’actuel regain de l’épidémie. Depuis, celui-ci a d’ailleurs estimé l’impossibilité de distinguer des personnes “à très haut risque vital ”.

Depuis fin août, le collectif Vulnérables sacrifiés anime vigoureusement une page Facebook, un compte Twitter, a écrit à tous les parlementaires, à la presse…

L’appui de personnalités

Le 8 septembre, la sénatrice communiste Laurence Cohen posait une question écrite au gouvernement.

Le 15 septembre, le président du comité scientifique (organe de conseil au gouvernement) Jean-François Delfraissy déclarait : « Oui, il y a quelque chose qui est un peu incohérent et que nous avons signalé d’ailleurs aux autorités de santé. » Il estimait que ce décret « tombait très mal, compte tenu d’une certaine forme de reprise de l’épidémie ».

Par ailleurs, selon une enquête de l’Agefiph 31 % des bénéficiaires de l’obligation d’emploi sont considérés comme vulnérables par les employeurs. Et 44 % des bénéficiaires de l’obligation d’emploi se sentent vulnérables.

Des centaines de requêtes devant le Conseil d’État

Et ce n’est pas tout. Depuis mi-septembre, les requêtes attaquant le décret devant le Conseil d’État explosent. Olivier Berruyer, animateur du site les-crises.fr a ouvert le bal. Il a cofondé un autre collectif, Les Sacrifiables, « regroupant certaines des personnes ayant déposé un recours contre le Décret du 30 août ».

Il explique sur les deux sites comment tout un chacun peut le faire à son tour via un Télérecours citoyen, sans avocat. Objectif : faire masse pour que ces recours soient regroupés et pèsent. Il décrit deux procédures possibles : le recours référé-liberté et le recours pour excès de pouvoir.

Les cinq membres du collectif Vulnérables sacrifiés ont chacun déposé un recours (il ne s’agit pas d’une plainte groupée). Et ils ont lancé un appel à leurs signataires et followers à faire de même. « D’après le greffe de la chambre du Conseil d’État, 500 requêtes sont déjà arrivés », indique Jessica Scemama.

Associations de patients et de médecins mobilisées

Le 24 septembre, la Ligue contre l’obésité annonçait, elle aussi, avoir déposé deux recours. Elle réclame aussi notamment « la mise en place d’une instance de conciliation, sous l’égide de la médecine du travail, pour les personnes vulnérables ».

Cela allonge la liste (ici non exhaustive) des organisations hostiles au décret.

Le 25 septembre, d’après le collectif Les Sacrifiables, la première vague de référés était rejetée. Le 27 septembre, le collectif Vulnérables sacrifiés lançait une campagne mettant en avant des témoignages récoltés.

Comment 5 commentaires

Un peu énervée car ce decret concerne aussi les fonctionnaires, la journaliste les a complètement oubliés. Par exemple, les personnels hospitaliers sont fonctionnaires, les enseignants et les administratifs de l’éducation nationale sont des fonctionnaires, … beaucoup de fonctionnaires vulnérables sont aussi concernés par ce decret discriminatoire, et la journaliste n’en fait pas mention !!!!! Il faut très vite réparer cet oubli .

“s’estimant vulnérable” ça laisse penser qu’on se juge vulnérable seuls, sauf que ça ne fonctionne pas comme ça… On est suivi par une panoplie de médecins, on fait des dossiers longs comme le bras pour avoir une reconnaissance de notre handicap en passant par la MDPH. C’est tout sauf une “estimation”. L’article oubli aussi toutes les maladies rares ! Les oubliés depuis le début… C’est une catastrophe ce qu’il se passe et le message ne passe pas dans l’article…

Bonjour,
Depuis le nouveau décret, je suis passé de personne à risque éligible au télétravail à personne non à risque et non éligible au télé travail.
Lorsque la politique et l’argent passent devant la santé et les valeurs humaines.
20 ans dans mon entreprise, un arrêt de travail pour infarctus….
Ou nous envoie t on?

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