Flashback : « Les Paralympiques de Tokyo 1964, c’était l’époque des pionniers »
Tokyo organise pour la deuxième fois les jeux Paralympiques. La première remonte à 1964. René David y a remporté deux médailles en tir à l’arc. Ce chercheur du CNRS à la retraite nous raconte son périple de vingt heures en avion en passant par l’Alaska, l’accueil des Japonais, les autocars adaptés dernier cri ou le gymkhana en fauteuil… Voyage dans le temps.
1964, jeux Paralympiques, Tokyo. Le Grenoblois René David remporte une médaille d’or au concours de tir à l’arc par équipe et une médaille de bronze en individuel. Cet ancien sportif paraplégique et ex-chercheur au CNRS se souvient d’une aventure vraiment inattendue.
Paris, Londres, Hambourg et l’Alaska
Son histoire débute le 5 novembre 1964. Pour son baptême de l’air, le jeune Français de 25 ans s’envole de Paris-Orly pour un long périple avec la délégation française. L’avion effectue d’abord un crochet par Londres, puis Hambourg, où les sportifs anglais et allemands les rejoignent. Avant un ultime arrêt à Anchorage, en Alaska. « Je suis resté plus de vingt heures dans l’avion, se souvient René David. Les personnes valides ont pu descendre lors de la dernière escale, mais pas les paraplégiques. »
Des autocars japonais très novateurs
À son arrivée, René David découvre émerveillé l’organisation japonaise. Dès la montée dans l’autocar, effectuée par l’arrière « via une plateforme élévatrice ». Système très novateur à l’époque. « Le car est presque vide de sièges et des sangles de cuir, solidaires du plancher, sont prévues pour attacher les roues (…) Un peu plus d’une heure après l’atterrissage les 120 paraplégiques de l’avion roulent sur l’autoroute en direction du village paralympique », notera-t-il dans ses carnets.
Défilé devant la famille impériale
Il se souviendra aussi « des innombrables bénévoles enthousiastes ». Ou encore des militaires toujours prêts à véhiculer les sportifs dans les chemins difficiles ou pentus.
Des rencontres superficielles ? Pas vraiment, puisque le Français gardera contact avec certains bénévoles et interprètes japonais pendant plus de trente ans.
Lors de la cérémonie d’ouverture 500 sportifs défilent devant le prince héritier Akihito et son épouse, avant de laisser place à une centaine d’étudiants pour une démonstration de kendo (combat de sabre) en tenue traditionnelle.
Seulement quelques handicaps représentés
Bien loin des 4 400 athlètes inscrits aux Paralympiques en 2021… À l’époque, la compétition s’adresse uniquement aux athlètes paraplégiques ou atteints de poliomyélite. « Les autres handicaps physiques ont été intégrés à partir de 1972 », rappelle le Grenoblois.
« Nous avions tous le même fauteuil, un modèle en acier qui roulait bien, mais très lourd »
Moins de disciplines au programme également. « Principalement des épreuves de tir à l’arc, d’escrime, tennis de table, natation, basket et gymkhana en fauteuil roulant. Pas ou peu d’athlétisme », liste René David. Le matériel aussi semblerait aujourd’hui limité. « Nous avions tous le même fauteuil, un modèle en acier qui roulait bien, mais très lourd », ajoute-t-il.
L’or et le bronze au tir à l’arc
Cela n’empêchera pas les vingt athlètes tricolores de remporter treize médailles dont quatre en or. René David se distingue non seulement en tir à l’arc (décrochant l’or et le bronze) mais aussi en basket avec une quatrième place, après une déculottée face aux USA 61-24. Auteur de 18 points, il en garde tout de même un bon souvenir. « On m’a dit ensuite que j’avais ma place dans l’équipe américaine », sourit-il.
Une aventure sportive seulement un an après la rééducation
Une formidable aventure, encore improbable seulement un an avant. Comme beaucoup d’athlètes paralympiques, le jeune ingénieur a découvert le handisport en rééducation, au fameux centre de Berck-Plage, dans le Pas-de-Calais, à la suite d’un accident de la route en mars 1963.
Tout s’est alors enchaîné très vite. Cette même année naît la Fédération sportive des handicapés physiques de France. L’ingénieur va alors multiplier les compétitions de basketball puis de tir à l’arc. Il se fait rapidement repérer.
Le début d’un engagement
Un véritable tournant dans sa vie. Le natif de Saint-Nazaire, passé par Nantes et Angers, s’engagera ensuite dans la promotion du handisport dans sa région d’adoption. « Toi qui vas t’installer à Grenoble, il faudra que tu y montes une équipe de basket », lui avait glissé à l’oreille un membre du clan français à Tokyo.
Le médaillé paralympique va alors lancer un club en 1966 qui deviendra Grenoble Handisport, pour accueillir les personnes handicapées. « Le premier du Dauphiné », dixit son créateur. « J’ai été pris dans un mouvement qui me dépassait. Il y avait un vrai besoin », confie-t-il humblement.
Quel regard porte-t-il sur les Jeux version 2021 ? « Notre époque était celle des pionniers. Aujourd’hui, c’est celle des sportifs de haut niveau. Dont certains sont désormais de vrais professionnels », se réjouit l’ancien médaillé.
René David en quelques dates
1939 : naissance à Saint-Nazaire.
1962 : obtention d’un diplôme d’ingénieur.
1963 : victime d’un accident de la route. L
Novembre 1964 : participation aux jeux Paralympiques de Tokyo.
1964 : entre à la faculté des sciences de Grenoble , comme chercheur au sein du laboratoire d’automatique.
1969 : devient docteur ès Science.
1969-2000 : chercheur au CNRS, spécialisé dans les automatismes logiques, le test des circuits digitaux ou encore l’évaluation de performance des systèmes de production.
2000-2010 : départ en retraite. Il devient directeur de recherche émérite au CNRS.
Vos avantages :
- Magazine téléchargeable en ligne tous les 2 mois (format PDF)
- Accès à tous les articles du site internet
- Guides pratiques à télécharger
- 2 ans d’archives consultables en ligne
1 commentaire
Bonjour,
Avez-vous eu l’information du décès de René DAVID survenu le 2 février 2022, à FONTANIL-CORNILLON ?
Je suis un cousin issue de germain de René.
Pour information, je l’avais déclaré dans GENEASTAR comme personnalité sportive et professionnel.