Avec l’AAH, épargner, ce n’est pas gagné

Quelques euros d’intérêts imposables peuvent avoir de lourdes conséquences financières pour les allocataires de l’AAH : la diminution de leur allocation et, surtout, la perte de leur complément de ressources et de la majoration pour la vie autonome. Des associations réclament un assouplissement des règles de prise en compte des revenus d’épargne pour le calcul de l’allocation adulte handicapé.

D’un côté, 48 € de gagnés. De l’autre, plus de 2 000 € de perdus. Inutile d’être fort en maths pour comprendre que Martin⁽¹⁾ n’a pas fait une bonne affaire avec les parts sociales de la Caisse d’Épargne que sa mère avait achetées pour lui constituer un petit matelas d’économies. Elles lui ont certes rapporté 48 € d’intérêts. Mais la Caf a pris en compte ces revenus pour le calcul de son allocation adulte handicapé.

Résultat : son allocation a diminué de quelques euros par mois. Surtout, comme il ne touchait plus l’AAH à taux plein, il ne remplissait plus l’une des conditions ouvrant droit au complément de ressources. Il a donc également perdu ses 179 € mensuels. Soit 2 148 € par an.

Seize propositions pour une inclusion financière universelle

La mésaventure de Martin figure dans Le manifeste pour une inclusion financière universelle présenté ce matin par six associations, dont APF France handicap⁽²⁾  qui  mettent en avant 16 recommandations. Comme créer un service bancaire universel. Réduire les frais d’incident bancaires. Favoriser l’accès au micro-crédit personnel. Ou bien encore améliorer l’accès à l’épargne pour les allocataires de l’AAH.

Les revenus non imposables déjà exclus de l’assiette

Certes, pour calculer le montant de cette prestation, les caisses d’allocations familiales ne prennent pas en compte les revenus non imposables des placements financiers (livret A, livret d’épargne populaire (LEP), compte épargne logement (CEL), etc.). Mais tous les autres revenus imposables (dividendes des actions, intérêts des obligations et parts sociales, loyers…) entrent dans les ressources du ménage.

Un seuil pour le contrat épargne handicap

Les six associations réclament donc la mise en place d’un seuil pour la prise en compte des intérêts dans le calcul de l’AAH. Comme cela existe déjà, notamment, pour les revenus tirés d’un contrat épargne handicap. N’entre dans l’assiette des ressources que la partie dépassant la somme de 1 830 € imposables par an.

Un seuil, même peu élevé, permettrait d’éviter aux allocataires mal informés de voir leur AAH baisser pour quelques euros d’intérêts par mois. Et, pire encore, de perdre leur complément de ressources ou leur majoration pour la vie autonome, au motif qu’ils ne touchent plus l’AAH à taux plein. Des économies trop cher payées.

⁽¹⁾ Le prénom a été changé.
⁽²⁾ APF France handicap, la Confédération syndicale des familles, Emmaüs, Familles rurales, le Secours catholique et UFC-Que Choisir.

Pas de refus de crédit sans examen du dossier

Favoriser l’accès au crédit des personnes en situation de handicap : c’est l’une des propositions du manifeste pour une inclusion financière universelle. De nombreux allocataires se voient, en effet, refuser une demande de prêt au motif que leur AAH est insaisissable.

Pourtant, un établissement de crédit n’a pas le droit d’écarter une demande d’emprunt pour la simple raison que le candidat perçoit cette allocation. Cela constitue une discrimination. Le Défenseur des droits l’a rappelée dans une décision, en 2018.

Oui, l’établissement a le droit de refuser une demande de prêt… mais il est tenu de procéder à l’étude de la solvabilité du dossier avant de donner sa réponse.