Renan Luce : « Enfant, le handicap de ma sœur était une évidence imposée par la vie »

Dans son livre, Une famille inquiète, sorti le 12 octobre, le chanteur Renan Luce évoque son histoire familiale marquée par la présence, au sein de la fratrie, de sa sœur Claire, 45 ans, atteinte du syndrome de Saethre-Chotzen. Un récit qui montre la force et les fragilités d’une famille touchée par le handicap. Une tribu traversée par une inquiétude silencieuse sur laquelle le chanteur a décidé de mettre enfin des mots.

Faire-face.fr : Est-ce difficile de grandir dans une fratrie avec l’un des enfants porteur d’un handicap ?

Renan Luce : Je suis le dernier de trois enfants. Claire est l’aînée. Je ne me suis jamais vraiment posé la question quand j’étais petit. Enfant, le handicap était une évidence imposée par la vie. C’est en grandissant que j’ai pris conscience des difficultés, des efforts supplémentaires que mes parents devaient fournir.  J’ai le souvenir d’avoir été témoin de moments compliqués quand ma mère lui faisait faire ses devoirs. Mais, de fait, cela m’a rendu vite autonome. La vie s’est déroulée ainsi. Et ce n’est qu’assez récemment que mes parents ont mis enfin des mots scientifiques sur la maladie dont elle est atteinte.

F-f.fr : De quoi se nourrit votre complicité ?

R.L : De choses simples car Claire est très attachée à ses habitudes. Mais elle vient me voir de temps en temps à Paris. Nous nous promenons. Elle prend régulièrement des nouvelles de sa nièce et elle assiste aussi à certains de mes concerts. Elle aime ma musique sans fascination extrême pour la célébrité. C’est sain.

Une sœur en quête d’autonomie

F-f.fr : Vous êtes sensible au handicap. Vous êtes d’ailleurs parrain de l’association Dyspraxie France Dys, mais vous n’en aviez jamais parlé dans vos chansons. Pourquoi l’aborder dans un livre ?

R.L : Parce que je suis arrivé à un moment de ma vie où des questions ont surgi. Et j’ai eu envie de raconter les liens qui unissent notre famille. Je suis resté très proche de ma sœur même si je suis parti assez tôt de chez moi. Et puis, avec l’avancée en âge, surgissent des questions auxquelles nous devons faire face, que nous ne pouvons pas éluder.

En tant que frères, il s’agit de se demander le rôle que nous jouerons auprès d’elle quand nos parents ne pourront plus assumer. »

F-f.fr : Que constatez-vous ?

R.L : Claire aspire à plus d’autonomie. Elle le ressent et l’exprime. Elle aimerait aussi s’épanouir dans une vie professionnelle qui lui procurerait des interactions sociales dont elle manque parfois. Travailler dans une bibliothèque serait son rêve. Mais ce n’est pas simple.

F-f.fr : Vos parents vieillissent. La question de savoir qui veillera un jour sur Claire se pose. Vous racontez qu’avec votre frère vous osez aborder ce que vous qualifiez de « passage de flambeau ».

R.L : Nous avons provoqué cette discussion. Bien sûr que cela soulève des questions, des peurs, mais autant l’aborder suffisamment tôt pour envisager sereinement ce que nous mettrons en place concrètement, comment nous pourrons nous faire aider. En tant que frères, il s’agit de se demander le rôle que nous jouerons auprès d’elle quand nos parents ne pourront plus assumer.