Rendez-vous lecture du vendredi

Sidération… Le mot est fort, violent, comme ce qu’il représente. Sidérations… Événements dramatiques, aberrations humaines et inquiétude profonde plongent Robin, jeune personnage de ce roman, dans cet état de choc. Un trop-plein émotionnel dont son père tente de l’en départir. Voilà bien un ouvrage qui pourrait, le temps de sa lecture, fasciner, voire sidérer, celle ou celui qui le lit.

Éco-anxiété

« Mon fils était un garçon perturbé, blessé de voir ce que ne voyait pas ce monde somnambule. Une thérapie excentrique l’avait rendu un peu plus heureux (…) », résume Theo Byrne, un astrobiologiste qui élève seul Robin. Un enfant de 9 ans au comportement inadapté à la vie scolaire et sociale, car alternant phases de colère et de dépression. L’origine de sa souffrance ? La mort de sa mère, une activiste amoureuse des êtres vivants, qui alertait sur l’effondrement d’une nature épuisée par l’exploitation de l’homme, effrayée par l’état du monde où « tout est en train de mourir ». Et c’est comme si elle avait transmis cette vive inquiétude à son fils. Robin a bien du mal à grandir dans son pays, une Amérique au bord du chaos climatique et politique.

La vie ailleurs et meilleure

De quoi attiser une passion commune avec son père : chercher de la vie ailleurs, dans l’univers ; de la vie meilleure qui rouvrirait le champ des possibles. L’espoir fait vivre, si ce n’est survivre. Mais, au quotidien, comment atténuer tant de turpitudes existentielles ? Hors de question de recourir à des psychotropes. Alors, en désespoir de cause, parti est pris de rééduquer le psychisme de Robin dans le cadre d’une expérience neuroscientifique. Si les premiers résultats paraissent stupéfiants, ils ne sont pas sans prix…
Un roman fascinant, à l’écriture très maîtrisée et à forte dimension métaphysique, dont les lecteurs ne sortent pas non plus indemnes. Élise Jeanne
♦ Sidérations, Richard Powers, Éd. Actes Sud, 400 p., 23 €.