Projet de loi plein emploi et handicap : des avancées… si elles sont financées
Le texte législatif présenté en Conseil des ministres le 7 juin ouvre la voie à la création de France Travail. Tous les demandeurs d’emploi devront s’y inscrire. Mais si les associations apprécient cet accès des personnes en situation de handicap au droit commun et certaines mesures spécifiques inscrites dans le texte, elles s’interrogent sur les moyens humains et financiers qui y seront alloués.
Au revoir Pôle emploi, bonjour France Travail. La transformation du service public de l’emploi compte parmi les objectifs principaux du projet de loi plein emploi. Il a été présenté en conseil des ministres le 7 juin.
Inscription obligatoire à France Travail
La nouvelle entité commencera à se mettre en place le 1er janvier 2024. Elle devra être finalisée au plus tard le 1er janvier 2025. Cela s’inscrit dans la promesse d’Emmanuel Macron de ramener le taux de chômage à 5% d’ici la fin de son mandat, en 2027.
Pour y parvenir, le texte prévoit que tous les demandeurs d’emploi devront être inscrits à France Travail. L’objectif : leur apporter un accompagnement renforcé et plus individualisé. Y compris donc pour ceux porteurs de handicaps. Les personnes en recherche de poste devront signer un “contrat d’engagement unifié”. Ce document mentionnera des objectifs d’insertion sociale et professionnelle et le niveau d’intensité de l’accompagnement.
Un motif d’inquiétude : le renforcement des sanctions
« Aller vers les demandeurs d’emploi, mieux évaluer leurs besoins et les soutenir dans la mise en œuvre de leur parcours, tout cela va dans le bon sens », commente Carole Saleres, conseillère nationale emploi, travail, formation et ressources à APF France handicap. « Nous sommes favorables à la logique de droit commun du texte », abonde Stéphane Lenoir, coordinateur national du Collectif handicaps.
Mais tous deux alertent sur le renforcement prévu des sanctions en cas de non-respect des engagements. Une menace qui plane surtout sur la tête des allocataires du RSA. Or, soulignent ces experts, certains d’entre eux pourraient être empêchés de remplir leurs obligations, du fait de leur handicap, psychique en particulier. En 2021, la Drees, organisme public de statistiques, comptabilisait 21 % de personnes en situation de handicap parmi ces allocataires du RSA. Un chiffre inférieur à la réalité selon Stéphane Lenoir. Pour lui, il conviendrait de parler plutôt d’un allocataire sur trois et non d’un sur cinq.
Quelques mesures spécifiques pour les personnes handicapées
Outre la réforme du service public de l’emploi, le projet de loi comprend des mesures spécifiques à l’emploi des personnes handicapées. Elles traduisent certaines des annonces faites à la Conférence nationale du handicap, fin avril. Ainsi, désormais, les personnes en recherche d’emploi seront orientées en Ésat ou entreprise adaptée sur recommandation du service public de l’emploi, et plus par la seule MDPH.
D’autre part, les titulaires de pensions d’invalidité pourront faire valoir les mêmes droits que ceux détenant une RQTH. Enfin, les MDPH informeront systématiquement France Travail de l’octroi d’une telle reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé. En revanche, la révision des règles de cumul entre revenus salariés et AAH pour les personnes disposant d’un taux d’incapacité compris entre 50 et 79 % ne figure pas dans le projet de loi.
Pour leur part, les entreprises adaptées voient les CDD tremplin et les entreprises adaptées de travail temporaire pérennisées. Elles vont entrer dans le Code du travail.
Les moyens financiers et humains : le grand point d’interrogation
Tout ceci va nécessiter le déploiement de moyens humains supplémentaires, et leur montée en compétences en matière de handicap, insistent tant Carole Saleres que Stéphane Lenoir. Et ce dernier d’ajouter : « De plus, tant qu’on n’aura pas revu les méthodes de recrutement, les personnes handicapées se retrouveront toujours en concurrence avec des personnes qui leur passeront devant ! »
Autre regret : France Travail ne prévoit pas d’intégrer à sa gouvernance des associations représentatives. Aucune place ne semble donc accordée à la parole des usagers.
Le texte passera en première lecture au Sénat en juillet prochain. Mais l’heure de vérité reste le projet de loi de finances 2024 qui sera discuté au Parlement à l’automne. Puisque sans moyens financiers dédiés, les intentions ne seront pas suivies d’effet.
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1 commentaire
Observations tellement justes
Merci