[Lecture du vendredi] Danser pour survivre : l’acceptation de soi selon Angelina Bruno

Publié le 25 octobre 2024 par Claudine Colozzi

On a pu la voir aux cérémonies d’ouverture et de clôture des jeux Paralympiques. Danseuse de hip-hop, chorégraphe, danse-thérapeute, mais aussi sophrologue, la Belge Angelina Bruno a été amputée à l’âge de 17 ans à la suite d’un accident de voiture. Dans son livre Danser pour survivre, elle dévoile comment son handicap, qu’elle a d’abord vu comme un frein, l’a poussée à se révéler à elle-même.

Certains récits de vie de personnes en situation de handicap sont précieux. Ils aident à découvrir combien chacune parvient à construire son propre parcours, en dépit des obstacles érigés par la société. « Les limites sont celles qu’on s’impose » résonne comme un mantra pour Angelina Bruno. Mais pas un mantra vide de sens qu’on se répète à l’envi comme une pensée magique. Si la danseuse cite cette phrase à la fin de son livre, c’est parce que son chemin de vie depuis 2004, année de l’accident de voiture qui a failli lui coûter la vie, l’a conduite à y croire profondément. Et elle aimerait que, grâce à son témoignage, d’autres cassent à leur tour les barrières mentales qui les bloquent.

Se débarrasser de la colère

Amputée de son avant-bras droit à l’âge de 17 ans, Angelina Bruno a d’abord traversé les épreuves que vivent nombre de victimes d’un grave accident. Opérations, douleurs, honte de son corps qu’elle ne reconnaît plus, perte de sens… La danse hip-hop l’a aidée à se reconnecter à son apparence physique, à projeter hors d’elle cette colère qui l’étouffait. Peut-on danser quand on n’a qu’un seul bras ? Si elle s’est posé la question, la jeune femme a su dépasser le complexe de l’imposteur. « Je me sentais tellement nulle, écrit-elle, évoquant son premier cours. Mais au-delà de la nullité, il se passe pourtant quelque chose en moi. Mon corps se met en mouvement dans une danse qui demande de se contracter, d’être ancré, d’envoyer une masse d’énergie. Et sur le coup, ça me fait tellement de bien ! »

Durant vingt ans, Angelina Bruno a tracé un chemin jalonné de défis. Partir aux Etats-Unis, passer des auditions, se créer le personnage d’Angelina. Elle raconte les élans, les doutes, les peurs, les grandes joies, l’excitation d’être choisie pour accompagner le chanteur de rap Black M lors de ses tournées. L’artiste, qui adore la scène, est également une femme qui a entrepris un profond travail sur elle-même. Danse-thérapeute, sophrologue, elle a à cœur d’aider ceux qui sont touchés par le handicap ou la maladie. Mais aussi, toutes les victimes d’une société débordant d’injonctions.

Accueillir les surprises de la vie

Le hip-hop, ainsi que les rencontres qu’il a mises sur son parcours, ont sauvé Angelina Bruno. « En continuant la danse, mon handicap allait petit à petit s’intégrer à moi, me permettant de l’allier au reste de mon corps. La danse m’a permis de le mobiliser et surtout d’unifier l’ensemble qui avait été complètement bousillé, ma représentation corporelle avait éclaté en mille morceaux. » Sereine, épanouie, Angelina Bruno avance tête haute, accueillant avec enthousiasme les surprises que la vie lui réserve. Ses mots nous poussent à changer notre regard sur nous-même. Son livre donne furieusement envie de se mettre en mouvement.

Danser pour survivre, Angelina Bruno, éd. du Rocher, 2024, 208 p., 17,90 €.

 

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