Cassée debout [France TV] – Le nécessaire combat de Marie Rabatel contre les violences sexuelles faites aux femmes et aux enfants handicapés

Publié le 25 novembre 2024 par Claudine Colozzi
Marie Rabatel : « Je dis souvent que je suis une jardinière qui sème des graines pour espérer que les personnes qui reçoivent ces petites graines, puissent les faire germer, puis les faire fleurir. » © Yann Rineau

Cassée debout raconte le combat de Marie Rabatel qui lutte depuis des années pour lever le silence sur les violences sexuelles faites aux femmes et aux enfants en situation de handicap. Le portrait saisissant d’une militante, elle-même victime de viol à 12 ans. « Morte à l’intérieur », mais debout pour mettre en place des outils de prévention et faire entendre la voix des victimes. Un documentaire de Franck Seuret et Yann Rineau diffusé jusqu’au 19 décembre en replay sur France TV.

Elle est partout où il est question des violences à l’encontre des femmes et des enfants en situation de handicap. C’est son combat depuis qu’elle a créé l’Association francophone de femmes autistes (AFFA) en 2016. La violence, Marie Rabatel sait bien ce que ce mot recouvre. Victime d’un viol à l’âge de 12 ans, cette Iséroise a longtemps passé sous silence ce qu’elle avait vécu. Cet épisode traumatique qui l’a cassée car personne ne l’a crue, elle l’évoque avec courage devant la caméra de Franck Seuret et Yann Rineau, dans le documentaire Cassée debout. Elle revient sur les lieux et laisse les souvenirs, douloureux, remonter à la surface.

Si la parole des femmes et des enfants ne pèse encore pas lourd quand il est question de violences sexuelles, celle de Marie Rabatel est d’autant plus minimisée qu’elle est autiste. Raillée, rabaissée, elle trouve sa planche de salut dans le sport. Au collège, un prof d’EPS lui propose le lancer de disque : « Quand je lui ai dit que je n’y connaissais rien, il m’a répondu : c’est simple, tu imagines que tu mets une forte claque. Alors, j’ai claqué tous ceux qui m’avaient harcelée, moquée, salie. » Marie sera plusieurs fois championne de France.

Redonner aux personnes handicapées leur pouvoir de décision

Mais l’élément déclencheur de son combat est la rencontre fortuite avec son agresseur, plus de vingt ans après. Cet épisode réveille le traumatisme profondément étouffé. Marie Rabatel va être hospitalisée pendant cinq ans. Elle en perd même l’usage de la parole. Quand elle la retrouve, elle se dit qu’il lui faut parler pour les femmes victimes de violences, comme elle.

Depuis huit ans, elle s’active sans relâche à promouvoir son combat : la prévention des violences sexuelles. Petit à petit, sa voix commence à porter. « Quand on naît avec un handicap, on nous apprend à être soumis à la voix de l’adulte (parent, éducateur…). On nous enlève le pouvoir de décision. Et même en tant qu’adultes, d’autres parfois, pensant bien faire, décident à notre place. Chacun doit pouvoir décider pour lui-même. »

En quelques années, Marie Rabatel est devenue une experte dans le champ des violences et du handicap. En mars 2021, elle a été nommée membre permanent de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (CIIVISE). Car outre les violences à l’égard des femmes handicapées, elle met toute son énergie dans la lutte contre la pédocriminalité.

Elle est ainsi parvenue à ce que la CIIVISE porte une attention particulière aux enfants en situation de handicap. Chaque année en France, 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles. Les enfants déficients intellectuels ont cinq fois plus de risque d’être des victimes.

Dans ses conclusions, rendues fin 2023, la Commission avait consacré un chapitre entier au sujet des violences subies par les enfants handicapés, sans différencier ses 82 recommandations. De fait, elles s’appliquent donc à tous, avec ou sans handicap. Mais depuis cette commission a connu bien des soubresauts.

Une semeuse d’espoir

Marie Rabatel intervient aussi auprès des forces de l’ordre, souvent démunies lorsqu’il s’agit de recueillir les témoignages de personnes handicapées abusées. Avec les gendarmes, elle est en cours d’élaboration d’un protocole d’audition des victimes handicapées. « Je dis souvent que je suis une jardinière qui sème des graines pour espérer que les personnes qui reçoivent ces petites graines, puissent les faire germer, puis les faire fleurir », explique-t-elle avec humilité. Une semeuse d’espoir, debout face aux violences.

Disponible en replay sur la plateforme france.tv

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