Dans son nouveau livre, Guillaume de Fonclare continue à sonder la marge
Ancien directeur de L’Historial de la Grande Guerre à Péronne (Somme), Guillaume de Fonclare est devenu écrivain alors qu’il était touché par une maladie auto-immune paralysante. Il a écrit deux récits autobiographies, Dans ma Peau (2010) où il raconte son combat contre la maladie et Dans tes Pas (2013) où il se met dans ceux d’un ami très proche pour comprendre son suicide. A suivi Joë (2014), consacré au poète français Joë Bousquet*. Le 5 avril prochain, il publie son premier roman, Garbo, et sera demain, jeudi 30 mars, à 20h35, à La Grande Librairie, l’émission littéraire de France 5 afin d’en parler. Interview sous forme de confession pour découvrir son cheminement littéraire.
Faire Face : Vous sortez dans quelques jours Garbo**, le portrait de Juan Pujol Garcia, un espion durant la Seconde Guerre mondiale dont les talents d’acteurs lui ont valu ce surnom. Vous êtes passé du récit (auto)biographique au roman. Pourquoi ce glissement de genre littéraire ?
Guillaume de Fonclare : L’écriture est devenue l’activité principale de ma vie. Je suis passé naturellement à des livres dans lesquels je suis de moins en moins acteur. Pour Garbo, j’ai eu envie de sortir d’une vision dans laquelle j’apparais à quelque chose de plus fictif. En me basant néanmoins sur un personnage qui a réellement existé et dont je prends la voix.
Je fais comme si je parlais à sa place, à l’instar de ce que Robert Merle a accompli avec La Mort est mon métier : il s’était servi des confessions de Rudolf Hoess, commandant des camps d’Auschwitz. J’ai lu cet ouvrage enfant et j’avais été très frappé par la façon dont il s’était accaparé la vie d’un autre pour construire son propre roman.
« J’ai toujours eu l’impression d’être différent des autres. »
FF : Qu’est-ce qui relie vos différents livres ?
G.d.F : D’une part, je reste à la première personne en utilisant le “je”. D’autre part, mes personnages sont toujours des êtres qui restent en marge de la société. Moi-même, j’ai toujours eu l’impression d’être différent des autres, bien avant la maladie.
Par mon tempérament et mon caractère, je n’ai jamais été vraiment sociable et j’ai toujours été intéressé par cette question de la marge. Encore plus aujourd’hui ! Il suffit que j’aille faire une balade en fauteuil pour la ressentir. Le regard porté sur la marge, “l’anormal”, dit beaucoup de l’être humain.
FF : Mais, dans vos livres, ce que vous donnez à voir, c’est avant tout la vie intérieure de vos personnages plus que le regard porté sur eux.
G.d.F : C’est vrai. Justement pour permettre au lecteur de s’interroger sur son propre monde intérieur. En travaillant sur la véracité et l’épaisseur des personnages, j’essaie de leur donner une réalité qui l’interpelle et de montrer, au final, que nous sommes un peu tous pareils.
« Ce qui m’importe aujourd’hui, c’est de vivre, pas d’être malade. »
FF : Vous le faites en semblant prendre de plus en plus de distance avec vos personnages. Peut-on y voir un parallèle avec la manière dont vous vivez votre maladie ?
G.d.F : La maladie est davantage intégrée à mon existence. De ce fait, il est vrai qu’elle est devenue plus secondaire, plus “accessoire”. Quand j’ai écrit Dans ma Peau, j’étais persuadé que mon espérance de vie était très limitée. Et puis, le temps a passé… Les choses ne se dégradent pas aussi vite que j’avais pu le penser… Je fais désormais moins attention à la maladie. Ce qui m’importe aujourd’hui, c’est de vivre, pas d’être malade. Inconsciemment, cela se traduit certainement dans les sujets que je choisis pour mes livres. Propos recueillis par Élise Jeanne
*Ses trois premiers livres ont été chroniqués dans le magazine Faire Face.
** Tous les ouvrages de Guillaume de Fonclare sont parus aux Éditions Stock.
Vos avantages :
- Magazine téléchargeable en ligne tous les 2 mois (format PDF)
- Accès à tous les articles du site internet
- Guides pratiques à télécharger
- 2 ans d’archives consultables en ligne