« Rappeur autodidacte, la musique m’aide à tenir debout. »
Aloïs Dessaux, alias Al Paccenou, 39 ans, est un rappeur français. En situation de handicap suite à une mauvaise chute il y a une quinzaine d’années, il considère la musique comme une échappatoire à un monde pas toujours bienveillant à l’égard des écorchés de la vie.
« Dans mon adolescence, le sport a occupé une grande place, à la limite de l’addiction. Quand, à 23 ans, un accident stupide – une chute d’un balcon – est venu mettre un terme à cette frénésie sportive, je l’ai très mal vécu. Les deux pieds “explosés”, il n’était plus question de pratique physique intensive. Pendant longtemps, je n’ai pas voulu reconnaître mon invalidité, ma fragilité.
Dans ces moments douloureux, où les soucis minent, on cherche un refuge. Le rap a été pour moi salvateur. Je me suis lancé dans la musique, en parfait autodidacte. Le rap permet cela. J’ai commencé à égrener des couplets accompagnés de rythmes et j’ai plongé dans le bain. C’était normal d’opter pour ce style musical car j’ai toujours aimé écouter du rap.
J’aimerais sortir un album mais la production coûte cher
Les thèmes sont arrivés tout seuls et continuent de venir sous ma plume sans que je définisse à l’avance mes sujets d’inspiration. Les punchlines surgissent et j’en fais des morceaux. Je ne suis pas seul. Je fais partie d’une association composée d’artistes et de passionnés de musique. Music-All accompagne de jeunes talents musicaux et l’art urbain dans le Loiret. J’ai beaucoup appris au contact des gens gravitant dans cette association. Ils m’ont soutenu et permis de croire un peu en moi, en mes capacités à m’affirmer en tant qu’artiste.
J’ai choisi comme nom Al Paccenou, en référence à l’acteur Al Pacino, bien sûr, mais aussi pour montrer comment on peut rapidement être exclu pour ses origines (“pas d’chez nous”) ou son handicap. Je me suis fait connaître via YouTube ou un site comme Reverbnation, utilisé par des groupes ou des artistes.
J’aimerais beaucoup sortir un album mais la production coûte cher. Je m’offre parfois un jour en studio. J’apprécie ces conditions de travail idéales. Je travaille sur un EP actuellement qui sera bientôt terminé.
Mes douleurs me rappellent sans cesse à l’ordre
La vie n’a pas toujours été bienveillante avec moi. Progressivement, le monde professionnel s’est fermé pour moi. D’un côté, je minimisais mon handicap, d’un autre, j’avais l’impression de ne pas être reconnu comme personne en situation de handicap. J’ai progressé sur cette question. Le rap m’a aidé à me calmer, à me poser, tout comme ma vie de famille.
Aujourd’hui, mes douleurs me rappellent sans cesse à l’ordre. Mon handicap ne me laisse pas tranquille. La musique m’aide à tenir debout quand je penche un peu trop fort. Comme le sport, c’est une manière de se dépasser qui porte dans les moments où l’on pense sombrer. Le rap m’aide à me sentir vivant. » Propos recueillis par Claudine Colozzi
https://www.youtube.com/watch?v=bMLu1wD_l30&feature=youtu.be
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