Poliomyélite : quel prix à payer pour l’éradiquer ?
Certes, le virus de la poliomyélite n’a pas encore dit son dernier mot. Certes, grâce aux campagnes de vaccination systématiques, le nombre de cas dans le monde a énormément baissé (350 000 cas déclarés entre 1988 contre quelques milliers au début des années 2000). Faut-il pour autant continuer à mobiliser autant de sommes colossales (États, organisations internationales et associations) pour éradiquer de la planète cette maladie très contagieuse ?
La question paraît provocante, mais des spécialistes la posent au regard de la situation sur le terrain. Situation faite de méfiance des populations vis-à-vis de ce qui vient des pays occidentaux, de violences physiques ou verbales et même d’assassinats : « Entre décembre 2012 et juin 2013, une vingtaine de vaccinateurs ont été assassinés au Pakistan et une dizaine au Nigeria, soit une trentaine de morts en six mois pour 55 cas de polio déclarés dans le monde entier pour la même période », a déploré Claire Magone, directrice d’études au Centre de réflexion sur l’action et les savoirs humanitaires (Crash), lors d’un colloque organisé par Médecins sans frontières (MSF) le 19 octobre dernier à Paris. Selon elle, « la poliomyélite peut devenir l’instrument privilégié d’un chantage politique permanent » entre les autorités et des groupes d’opposition politico-religieux. Le directeur de la Global Polio Eradication Initiative (GPEI), le Dr Hamid Jafari, l’a reconnu : les « défis » sont désormais avant tout « politiques et sociaux ». Et Jean-Hervé Bradol, ex-président de MSF-France, d’enfoncer le clou en se demandant s’il ne vaudrait pas mieux consacrer une partie de l’argent pour la polio à la réduction de la mortalité infantile ou à des traitements contre le paludisme. Le débat est ouvert.
Élise Jeanne
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