Les accompagnants d’élèves handicapés demandent au gouvernement de revoir sa copie
Les premières mesures dévoilées par le gouvernement sur l’école inclusive ne satisfont pas les accompagnants d’élèves en situation de handicap. Ils sont dans la rue, ce mercredi 6 février, pour réclamer un véritable statut.
C’est leur dernière chance de se faire entendre. Les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) sont mobilisés ce mercredi 6 février. Dix syndicats les ont appelés à se réunir devant les rectorats, les préfectures… Le choix de la date ne doit rien au hasard. Un mercredi, jour sans école, pour éviter à ces salariés à faibles revenus de perdre une journée de salaire. Et le 6 février pour faire pression sur le gouvernement avant les derniers arbitrages ministériels.
Des annonces le 11 février
Lundi 11 février, Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’Éducation nationale, et Sophie Cluzel, la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, doivent en effet annoncer de nouvelles mesures sur l’école inclusive. Le dénouement d’une concertation lancée en octobre dernier. Jean-Michel Blanquer en a déjà dévoilé quelques-unes, le 1er février.
Deux contrats de trois ans avant un CDI
Tous les AESH bénéficieront d’un « contrat de trois ans renouvelable une fois avec à la clef un contrat à durée indéterminée », a-t-il assuré. Dès la rentrée 2019. Aujourd’hui, la plupart des AESH enchaînent des contrats d’un an avant de décrocher un CDI au bout de six ans.
« Ces contrats de trois ans existent déjà même s’ils sont peu utilisés, tempère Sébastien Monié, du Collectif AESH en action ! Surtout, pourquoi les AESH devraient-ils rester précaires pendant six années avant d’accéder à un CDI ? Et puis, nous, ce que nous voulons, c’est être titulaires de la fonction publique puisque que notre travail répond à un besoin permanent. »
Temps partiel contraint
Autre revendication des accompagnants : ne plus être contraints de travailler à temps partiel. Pour Jérôme Antoine, de la Coordination de collectifs AESH, « cela passe par une prise en compte des heures de travail invisibles que représentent les temps de concertation, de préparation... ». Le sujet est sur la table.
Le gouvernement privilégie une autre piste. Celle d’offrir à ces salariés la possibilité de compléter leur temps partiel à l’école par des heures d’accompagnement sur les temps extra-scolaires (garderie, centres de loisirs, etc.). Cela impliquerait qu’ils aient un second employeur, une mairie, par exemple. Si le scénario est à l’étude, les collectifs le rejettent aussi bien sur le fond que sur la forme.
Des pôles inclusifs d’accompagnement (Pial) encore flous
Une autre annonce de Jean-Michel Blanquer les inquiète : la mise en place de pôles inclusifs d’accompagnement localisé (Pial). Le concept, aux contours encore flous, consisterait à confier à un établissement, par exemple, la mission de « coordonner les moyens d’accompagnement ».
La Coordination de collectifs craint que cela aboutisse à une « mutualisation forcée » des moyens humains. En clair, un Pial disposerait d’un nombre donné d’AESH qu’il répartirait entre les élèves en fonction du temps de travail global disponible plutôt que des besoins réels des enfants.
Tête-à-tête parents-école
Cette tendance à la mutualisation est déjà à l’œuvre, comme Faire-face.fr l’avait relevé. Aujourd’hui, près de la moitié des notifications d’accompagnement portent sur des aides mutualisées – donc, sans indication d’un volume horaire – et non des aides individuelles (pour 8 heure, 12 heures, à temps plein…)
Sur ce sujet, les associations de parents d’enfants handicapés partagent les mêmes inquiétudes que les collectifs d’AESH. « On sent bien que l’Éducation nationale aimerait être seul maître à bord sur l’accompagnement scolaire, souligne Marion Aubry, la vice-présidente de Toupi. Elle cherche à limiter le rôle des Maisons départementales des personnes handicapées pour revenir dans une situation de tête-à-tête avec les parents qui lui est plus favorable. »
Un Pial ressources ?
« Aujourd’hui, tout laisse penser que l’Éducation nationale envisage avant tout les Pial comme un outil de gestion des accompagnants scolaires, un moyen de maîtriser les coûts, analyse Bénedicte Kail, la conseillère éducation d’APF France handicap. Un Pial ne peut être intéressant pour l’école inclusive que s’il ne se limite pas à cette question mais fonctionne comme un véritable centre de ressources, humaines, pédagogiques, thérapeutiques... »
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2 commentaires
Hier dans Libé une lettre ouverte au Président par Jean-Louis Garcia, président de la fédération APAJH avec comme titre ” L’Ecole de la confiance…?” J’espère qu’elle était aussi publiée dans le Figaro et autres journaux. Après son analyse critique de la méthode de gouvernance du Président, JL Garcia souligne le peu d’intérêt à la concertation montré par le Ministre de l’Education nationale et par la Secrétaire d’Etat au handicap. Je cite sa conclusion: “Mais comme le disait Démosthène: tout discours est vain s’il n’incite à l’action. L’école inclusive ne se réalise pas sans volonté farouche et notamment par des budgets pluriannuels”.
J’adhère à cette analyse critique. Bonne lecture
sur le terrain, on nous a dit clairement que les élèves avec un handicap, même ceux dont on avait auparavant reconnu le besoin d’être accompagné de manière individuelle (aide soutenue et continue), vont passer à une aide mutualisée (avec un nombre d’heure décidé par le chef d’établissement en fonction des moyens – et non plus en fonction des besoins). Pour bénéficier d’une aide individualisée il faudra argumenter un problème de “sécurité”… Les PIAL en marche !