Justice : les personnes avec des troubles psychiques bientôt pénalement responsables ?
La notice d’un décret d’application de la loi du 24 janvier dernier sur la responsabilité pénale et la sécurité intérieure risque de criminaliser les personnes handicapées psychiques. L’arrêt d’un traitement pourrait les conduire à répondre de leurs actes devant les tribunaux.
Les patients pourraient-ils parfois se voir considérés comme coupables de leurs symptômes ? Cela devient un risque, depuis la parution d’un décret d’application de la loi du 24 janvier dernier sur la responsabilité pénale et la sécurité intérieure . Une loi adoptée en réaction à l’affaire Sarah Halimi, cette parisienne juive tuée par Kobili Traoré. L’homme a été reconnu coupable mais irresponsable pénalement. Son jugement avait été aboli par une bouffée délirante causée par la consommation de stupéfiants.
Décision contraire à l’avis du Conseil d’État
La décision de justice relative à ce crime antisémite a choqué. Elle a entraîné l’adoption d’une nouvelle législation. La notice qui présente son décret d’application, en date du 25 avril, renvoie ainsi devant la justice pour répondre de leurs actes délictueux ou criminels les personnes ayant arrêté la prise d’un traitement. Au même titre que celles consommatrices de produits ayant causé une abolition temporaire de leur discernement.
Cette inclusion dans le décret des malades psychiques qui auraient interrompu leur traitement est contraire à l’avis du Conseil d’État, en juillet dernier sur le texte de loi. Et à la promesse du Garde des Sceaux. Les malades ne devaient pas être tenus pour responsables pénalement de leurs actes.
Lien simpliste entre arrêt du traitement et passage à l’acte
Le texte déclenche la colère d’un très grand nombre d’associations, de professionnels de santé, d’usagers de la psychiatrie ou de leurs aidants. Dans un communiqué commun du 29 avril, elles dénoncent en effet une « régression », et une nouvelle « stigmatisation » des personnes handicapées psychiques.
Elles rappellent que certaines peuvent ne pas avoir conscience de leurs troubles. Car l’arrêt d’un traitement ne relève pas toujours d’un libre-choix. De plus, elles estiment que cela établit un lien simpliste entre arrêt d’une prise de médicaments et passage à l’acte.
Bientôt une nouvelle circulaire ?
Ainsi interpellé, le ministère de la Justice indique ne pas avoir voulu criminaliser les malades. Et promet la parution prochaine d’une circulaire de la direction des affaires criminelles et des grâces pour préciser ce point.
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2 commentaires
En quoi consommer une substance interdite est un symptôme d’une maladie psychique ? Quant à l’abus d’alcool, drogue légale, où peut on la classer ?
Les méfaits d’un texte inabouti pris dans l’émotion d’ne décision de justice.
On sait comment ça se passe en Europe ? Je ne vois pas comment les instances européennes peuvent laisser passer ça.