Jeux paralympiques Paris 2024 – Agathe Pauli, paranatation : « J’ai toujours un nouvel objectif à atteindre »

Publié le 28 août 2024 par Claudine Colozzi
Même si elle se sent prête pour les Jeux de Paris, Agathe Pauli a choisi de renforcer sa préparation mentale pour l'aider à résister à la pression de la compétition. © DR

Triple championne de France en 2022 et médaillée d’argent du relais 4x100m nage libre aux championnats d’Europe en 2024, Agathe Pauli est l’une des figures prometteuses de la paranatation. À 21 ans, la jeune Marseillaise se réjouit de cette première qualification à des Jeux auxquels elle pense depuis qu’elle a commencé la compétition. Elle regarde même déjà au-delà de Paris 2024*.

Faire Face : Que représente cette première participation aux jeux Paralympiques ?
Agathe Pauli : Un rêve de gosse qui se réalise. J’y pense depuis que j’ai commencé la compétition, à l’âge de 7 ans ! Mon premier professeur de natation avait très vite repéré mon potentiel et, ensuite, je n’ai plus lâché cet objectif. À Tokyo, en 2021, mes résultats étaient encore un peu juste mais là, pour Paris, je suis prête !

FF : Un modèle vous a inspirée ?
A.P : On comparait souvent ma glisse à celle de Laure Manaudou. Alors, je suis allée voir sur Internet qui elle était, comment elle nageait. Et en la connaissant mieux, elle est devenue mon idole dans le milieu de la natation.

FF : Pourquoi ce sport ?
A.P : À 5 ans, ma mère, comme beaucoup de parents, voulait que j’apprenne à nager. D’emblée, j’ai été mise dans le groupe de ma sœur, de deux ans mon aînée. J’ai tout de suite aimé l’eau et je me débrouillais très bien. Puis, j’ai continué parce que j’avais une scoliose et que c’était bien pour renforcer les muscles de mon dos. Avec Handisport Marseille, j’ai commencé les compétitions et je me suis rapidement prise au jeu. Mes parents m’ont soutenue dans mon envie de persévérer dans cette voie.

À 16 ans, elle intègre le pôle France en sport-études pendant deux ans

FF : À quel moment, la natation prend-elle plus de place dans votre vie ?
A.P : D’une heure par semaine, je suis passée, au fil des années, à deux ou trois entraînements hebdomadaires. À 16 ans, j’ai pensé qu’il fallait augmenter le rythme pour accroître mes performances. J’ai donc décidé d’intégrer le pôle France à Talence, près de Bordeaux, en sport-études pendant deux ans, en première et terminale. Et là, j’ai beaucoup progressé. Ce qui m’a amenée à mes premières compétitions internationales avec l’équipe de France espoir.

FF : Après votre baccalauréat, vous rejoignez le club Handisport Antibes Méditerranée. Pourquoi ce choix ?
A.P : J’avais besoin de changement… et du soleil de la Méditerranée ! À Antibes, je m’entraîne aussi avec un groupe de nageurs valides. Je me sens davantage stimulée. D’ailleurs, dès la première année, en 2022, je me suis qualifiée pour mes premiers championnats du monde. En parallèle, j’ai continué mes études et, en 2023, j’ai validé un BTS ”support à l’action managériale”.

Là où je me sens la plus compétitive, c’est en crawl. »

FF : Votre spécialité, c’est le 400 mètres nage libre. Avez-vous une nage de prédilection ?
A.P : Nous travaillons les quatre nages car nous devons être les plus polyvalents possible. Mais là où je me sens la plus compétitive, c’est en crawl. Mon point fort n’est évidemment pas la brasse à cause d’une propulsion moyenne, du fait de mon handicap. J’ai une malformation congénitale, avec une jambe droite plus courte que l’autre au niveau du genou. Dans le relais 4×100 m nage libre, je privilégie donc également le crawl.

FF : Aujourd’hui, à quel rythme vous entraînez-vous ?
A.P : Entre les séances de natation, la prépa physique et mentale, cela représente 22 à 27 heures par semaine. L’année dernière, je faisais de la sophrologie, mais j’ai décidé de changer et de travailler davantage l’aspect psychologique. Quand on s’approche d’échéances telles que les Jeux, c’est difficile de relativiser, de ne pas se mettre la pression. Il y a beaucoup d’attente de l’entourage sportif et familial. Et comme je suis, de nature, un petit peu anxieuse, j’essaie de faire de la relaxation et d’échanger le plus possible sur mes doutes.

FF : La santé mentale des sportifs, on en parle de plus en plus. Êtes-vous bien entourée ?
A.P : Oui, je parle beaucoup, notamment avec ma mère. Parfois, en tant qu’athlète, on traverse des passages plus difficiles. Il faut vraiment s’aérer l’esprit. En raison des Jeux, j’ai mis mes études en stand-by et je sors beaucoup moins. Mais c’est important pour le mental d’avoir d’autres centres d’intérêt et une vie sociale à côté.

Ce qui motive Agathe Pauli ? Améliorer ses gestes techniques et son équilibre dans l’eau

FF : Qu’est-ce qui est le plus difficile dans la natation ?
A.P : Enchaîner les longueurs, parfois 10 km chaque jour, a un côté extrêmement répétitif, surtout quand on s’entraîne quotidiennement. On ne peut parler à personne, on regarde le fond du bassin, seule face à soi-même. Mais j’y retourne car il y a toujours des progrès à réaliser, un nouvel objectif à atteindre. Et puis j’aime être dans l’eau, je glisse, j’avance. Ce qui me motive, c’est aussi la relation à mon coach, Régis Gautier, qui me pousse à toujours m’améliorer dans les gestes techniques, à peaufiner mon équilibre dans l’eau par exemple.

En 2028, à Los Angeles, j’aurai 25 ans et donc encore mes chances. »

FF : Quels rapports entretenez-vous avec les autres membres de l’équipe de France ?
A.P : Nous nous soutenons beaucoup. Il y a aussi des nageurs avec plus d’expérience, comme David Smétanine, qui a un palmarès impressionnant. Nous nous entraînons dans le même club et il est d’un grand soutien.

FF : Trouvez-vous que l’on vous parle plus souvent de votre handicap que de vos performances ?
A.P : Non, comme pour tous les athlètes, mes résultats et mes chronos sont mis en valeur. Quant à mon handicap, cela ne me gène pas de l’évoquer. Il fait partie de mon histoire. Surtout que je suis en maillot, alors impossible de le cacher ! Finalement, la natation m’a beaucoup aidée à accepter cette différence : désormais, je m’en fiche complètement !

L’arrivée des sponsors avec les compétitions internationales

FF : Vous avez plusieurs sponsors. Ce travail de recherche de financement vous pèse-t-il ?
A.P : Je pensais que ce serait vraiment très compliqué, mais les soutiens sont arrivés quand j’ai commencé à participer à des compétitions internationales. Ils passent par la fédération ou nous repèrent sur les réseaux sociaux. D’où l’importance de soigner sa communication. Les Jeux à Paris ont sans doute aussi aidé. Certains sponsors ont déjà dit qu’ils continueraient de me soutenir pour 2028, donc je suis confiante.

FF : Vous vous projetez donc déjà vers les Jeux de Los Angeles ?
A.P : Quand on est athlète de haut niveau, on parle de pic de performance en fonction de l’âge. En 2028, j’aurai 25 ans et donc encore mes chances. En revanche, je ne regarde pas plus loin. Je pense que j’aurai aussi envie d’autre chose. C’est pour cela que je compte poursuivre mes études après les Jeux.

* Cet article a déjà été publié dans le magazine Faire Face – Mieux vivre le handicap de juillet-août 2024  et mis à jour à l’occasion des jeux Paralympiques.

Agathe Pauli en six dates
19 juillet 2003 : naissance à Marseille (13).
2010 : commence la compétition avec Handisport Marseille.
2019 : intègre le pôle France natation du Creps de Bordeaux-Talence (33).
2022 : rejoint le club Handisport Antibes Méditerranée (06).
2023 : médaille d’argent au relais 4x100m nage libre aux championnats
du monde à Manchester (Grande-Bretagne).
2024 : médaille d’argent au relais 4x100m nage libre aux championnats d’Europe au Portugal avec Laurent Chardard, Émeline Pierre et Ugo Didier.

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