Jeux paralympiques Paris 2024 – Damien Roget, volley assis : « J’ai l’esprit de la gagne »

Publié le 29 août 2024 par Claudine Colozzi
Après deux saisons de natation handisport, Damien Roget est repéré par le Comité paralympique et sportif français en 2019. La Fédération de volley lui propose alors d'effectuer un stage. C'est la révélation. © ParaVolley Europe

Damien Roget, 34 ans, se voyait professeur d’EPS, mais des séquelles neuromusculaires dues au syndrome de Guillain-Barré l’ont contraint à renoncer à son rêve. La découverte du volley assis a permis à ce compétiteur dans l’âme de renouer avec le sport. Membre de l’équipe de France, il participe à ses premiers Jeux. Il espère que cet événement mettra en avant sa discipline et donnera envie à des jeunes de se lancer à leur tour*.

Faire Face : Vous étiez un enfant sportif (natation, basket). Pourtant à 13 ans, vous êtes touché par le syndrome de Guillain-Barré et là, vous faites une croix sur le sport…

Damien Roget : En février 2002, je suis admis en service de réanimation. Les médecins diagnostiquent cette maladie. Avec le recul, il y avait eu quelques prémices que nous n’avions pas su voir, comme des problèmes de motricité. Je suis hospitalisé dix-sept jours. À ma sortie, j’ai perdu quatorze kilos. Je suis en fauteuil roulant. Je n’ai plus aucune force musculaire. Impossible, par exemple, de décapuchonner un stylo ou d’écrire.

FF : Comment abordez-vous le handicap ?

D.R : Je m’adapte. Ma scolarité se poursuit. Quand les autres vont en cours d’EPS, moi, je vais chez le kiné. En 2009, alors que j’ai tout juste 19 ans, le neurologue a des mots très durs. Il m’a prescrit un électromyogramme pour évaluer les séquelles neuromusculaires. Il me dit que je ne récupèrerai plus, que je ne pourrai plus courir ni faire de snowboard.

Pour moi qui rêvais de devenir professeur d’EPS, c’est très violent. J’encaisse, parce que je me suis fabriqué une grosse carapace. Ce n’est que plus tard, durant mes études pour devenir orthoptiste, que je découvrirai le concept de résilience.

Le sport pour sortir de sa zone de confort

FF : À quel moment avez-vous eu besoin de vous remettre au sport ?

D.R : Mon activité professionnelle a été mon défouloir jusqu’en 2017. Et puis, comme tout se passait bien, je me suis dit qu’il fallait que je sorte de ma zone de confort. J’ai eu envie de m’orienter vers la natation handisport. Je découvre un monde incroyable. Lors de ma première compétition, je me retrouve à côté de Théo Curin. Dingue !

Au volley, à l’exception du service qui dépend à 100 % de nous, on ne peut rien faire tout seul »

FF : Comment passez-vous de la natation au volley assis ?

D.R : Au bout de deux saisons de natation handisport, je suis repéré par le Comité paralympique et sportif français (CPSF) lors d’une Journée de la Relève où nous passons une série de tests physiques. À l’issue de ma participation, plusieurs fédérations s’intéressent à moi, dont la Fédération française de volley qui gère le volley assis. On me propose de faire un stage. Et je suis piqué par ce sport.

FF : Qu’est-ce qui vous a plu ?

D.R : Le sens du collectif. Au volley, à l’exception du service qui dépend à 100 % de nous, on ne peut rien faire tout seul. En tant qu’attaquant, je dois avoir une bonne réception, mais aussi de bonnes passes de la part de mes coéquipiers.

FF : Vous faites partie de l’équipe de France. Comment conciliez-vous votre vie professionnelle et votre engagement sportif ?

D.R : Il faut d’abord accorder sa vie perso et la compétition. Au début, j’avais un entraînement par semaine et aujourd’hui, cinq – deux collectifs et trois individuels. Pour mon activité professionnelle, j’ai une collaboratrice qui est présente au cabinet quand je dois m’absenter. Cela me permet de dégager du temps pour les entraînements, les rendez-vous médicaux, la préparation physique et mentale. J’interviens aussi en entreprises pour faire connaître le volley assis qui est en réel développement en France depuis seulement 2016.

Le collectif, c’est une somme d’individualités

FF : La relation que vous entreteniez avec votre corps s’est-elle trouvée modifiée par cette pratique sportive ?

D.R : J’ai pris dix kilos, notamment grâce à la musculation. J’ai réappris à manger, dormir, m’étirer. Mon équilibre de vie s’est amélioré. « Ta deuxième vie commence quand tu comprends que tu n’en as qu’une. »  Même si cette phrase semble un peu bateau, elle exprime bien mon état d’esprit.

FF : Que vous apporte votre participation aux jeux Paralympiques ?

D.R : J’ai toujours aimé la compétition. J’ai l’esprit de la gagne. Même quand je joue au Uno, j’ai envie de gagner. [Rires]

FF : Pourtant, quand on pratique un sport collectif, gagner ne repose pas uniquement sur ses seules épaules, mais sur toute une équipe ?

D.R : Je travaille sur cette question avec ma préparatrice mentale. Le collectif est une somme d’individualités. Si nous étions tous comme moi sur le terrain, ce serait horrible ! Un de mes coachs m’a dit : « Quand tu es sur le banc, on sent que tu ronges ton frein. Mais quand tu entres sur le terrain, c’est comme lâcher un cheval de course qui réagit à l’odeur du sang. » Cette phrase me résume très bien.

Mon rêve absolu serait qu’après nous avoir vus, des jeunes se lancent à leur tour »

FF : Où réside le challenge dans ces Jeux ?

D.R : Le volley français est très neuf alors que le volley assis est présent aux Jeux depuis 1980. La France a des décennies de retard par rapport à d’autres nations. Mon objectif premier est de montrer la plus belle image possible de mon sport. Car il faut être lucide sur notre niveau. Nous sommes loin du trio de tête, constitué par l’Iran, la Bosnie-Herzégovine et le Brésil. Mon rêve absolu serait qu’après nous avoir vus, des jeunes se lancent à leur tour.

Le volley assis, un super sport qui gagne à être connu

FF : Vous voulez inspirer une future génération ?

D.R : C’est tellement un super sport qui gagne à être connu. En plus, il est accessible financièrement. Il n’y a aucun matériel à acheter. On met des plots pour délimiter le terrain, on baisse le filet, et c’est parti ! J’imagine un jeune de 16 ans qui aura suivi l’équipe de France et poussera la porte d’un club. On va le former, en faire une future machine de guerre et le moment venu, il prendra peut-être la suite. Ce serait ma plus belle récompense.

FF : Que diriez-vous à une personne réticente à pratiquer un sport ?

D.R : Tu fais fausse route ! Essaie, renseigne-toi, trouve des personnes qui vont t’accueillir dans un club. Le chemin ne peut venir que de toi-même.

Damien Roget en six dates

26 avril 1990 : naissance à Échirolles en région Auvergne-Rhône-Alpes (38).
2003 : diagnostic du syndrome de Guillain-Barré.
2013 : orthoptiste en structure libérale à Grenoble (38).
2018 : licencié au club de Moirans Multi Volley-Ball (38).
2019 : repéré par le sélectionneur Stéphane Girodat, il intègre l’équipe de France de volley assis.
2020 : première participation aux championnats d’Europe B en Slovénie.

* Cet article a déjà été publié dans le magazine Faire Face – Mieux vivre le handicap de novembre-décembre 2023 et mis à jour à l’occasion des jeux Paralympiques.

Comment 1 commentaire

Damien est réellement un super gar, équipé modele dans son club, le PVV, qu´il a mené en phase finale de la coupe d´Europe.
Bravo Damien pour ces fabuleux J.O

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