Mélissa Da Costa [Tenir Debout] : « Mon souci était d’être au plus juste dans l’écriture »

Avec son huitième livre Tenir Debout, en librairies depuis le 14 août, Mélissa Da Costa propose un récit à deux voix, celles de François et d’Éléonore, un couple confronté à un accident de la vie. L’autrice la plus lue en France livre un roman entre ombre et lumière, bien documenté sur le handicap. Elle nous raconte comment elle a travaillé sur cette thématique.

Faire Face : François, acteur quadragénaire charismatique, vit une histoire d’amour clandestine avec Éléonore, une étudiante, de vingt ans sa cadette. Alors qu’il s’apprête à quitter sa femme, il est percuté par un bus en scooter et devient paraplégique. Leur couple résistera-t-il à cette épreuve ? C’est l’une des questions auxquelles répond votre nouveau roman Tenir debout. Comment vous est venue l’idée de ce livre ?

Mélissa Da Costa : J’avais déjà abordé le handicap physique dans un précédent livre Les Douleurs fantômes, sorti en 2022. Parmi tous les personnages, il y avait un couple dont l’un des protagonistes avait eu un accident et était dépendant dans les actes de sa vie quotidienne. La colère, la rancœur venaient affecter le couple.

Je me suis dit que ce serait intéressant de creuser ce thème. Au-delà du handicap, montrer comment un couple peut réagir à une épreuve qui vient faire vaciller l’équilibre sur lequel il s’est créé. Comment on se reconstruit quand l’image que l’on a de l’autre est ébranlée.

Oser parler de sujets peu abordés

FF : Vous dédiez votre texte à Yann et Pauline, « sans qui ce roman n’aurait probablement pas vu le jour, ou en tout cas pas tel qu’il existe aujourd’hui… ». Qui sont-ils ?

M.D.C : Quand j’ai commencé à écrire, mon souci était d’être au plus juste et au plus près de la réalité d’un couple confronté au handicap. J’ai surfé sur des forums, des sites, et je suis tombée sur ce couple. Yann est très actif sur les réseaux sociaux où il fait de la sensibilisation au handicap.

Après une première prise de contact où je leur posais des questions, nous avons commencé à échanger en visio et nous avons noué une relation solide. Grâce à leur témoignage, Tenir debout est traversé d’une lumière qui n’est pas celle que j’avais envisagée au départ.

FF : Pourquoi vous être à ce point documentée ?

M.D.C : C’est comme cela que j’envisage mon travail d’écriture. Et puis, je voulais comprendre ce qui se passe dans la tête de quelqu’un qui devient paraplégique à la suite d’un accident. Ce qu’il ressent, les difficultés auxquelles il est confronté, les douleurs, les doutes… Nos échanges m’ont beaucoup aidée tout comme le regard d’expert du Dr Sarah Mathieu, spécialiste en médecine physique et de réadaptation. Il fallait aussi aborder des questions autour de l’intimité, du désir, du rapport au corps. Oser parler de sujets que l’on aborde peu au final.

Mettre en avant les aidants

FF : Vous racontez cette histoire à travers la voix de François et d’Éléonore. Pourquoi ce parti-pris ?

M.D.C : Chacun des deux protagonistes vit l’épreuve à sa manière. Il fallait confronter ces deux ressentis, ces deux visions. C’est aussi une façon de mettre en avant les aidants auxquels on ne prête pas toujours l’attention qu’ils méritent. Il y a aussi chez eux une vraie détresse que l’on ne mesure pas toujours.

FF : Craignez-vous que l’on vous reproche une vision validiste ?

M.D.C : Même si l’on m’a mise en garde, je sais que l’on ne peut pas échapper à certaines remarques. Tenir debout est une fiction dans laquelle certaines personnes en situation de handicap se reconnaîtront, d’autres pas. L’idée était d’être le plus pertinente possible. Bien sûr, chaque histoire est différente. Chaque façon de se relever aussi. Yann m’a confié que l’accident qu’il l’a laissé paralysé l’a révélé. Avec Pauline, ils ont su se réinventer malgré l’épreuve qu’ils ont traversée ensemble. Yann m’a même dit qu’il préférait la personne qu’il était devenu aujourd’hui.

Tenir debout, Mélissa Da Costa, éd. Albin Michel, 608 p., 22,90 €.